Une machine de sport qui se perfectionne encore

Peut-on continuer à progresser physiquement dans la soixantaine ? Lucie Rochon prouve que oui. En avril dernier, la marathonienne a réalisé sa meilleure performance à vie au prestigieux marathon de Boston, grimpant sur la première marche du podium dans sa catégorie d’âge. Portrait d’une athlète d’exception.

17 avril 2023. En ce jour du 127e marathon de Boston, le temps est maussade. Il pleut, il vente. C’est frisquet. Le genre de journée où on ne veut pas mettre le nez dehors. Pourtant, Lucie Rochon, 65 ans, exulte. La météo moche, elle adore. C’est à ces moments-là qu’elle réalise ses meilleures performances.

Et performance, elle en réalisera une exceptionnelle. Cette résidante de Saint-Augustin-de-Desmaures, en banlieue de Québec, franchit la ligne d’arrivée du trajet de 42,2 kilomètres en 3 heures 25 minutes et 58 secondes. Elle devance ainsi les 220 autres coureuses dans sa catégorie d’âge (65-69 ans) au marathon le plus prestigieux de la planète.

Une performance inattendue

Lucie Rochon admet qu’elle ne s’attendait pas à une telle performance. Son entraîneur au sein de son club de course La Foulée, Jacques Mainguy, non plus : « Elle avait connu des semaines éprouvantes peu avant le marathon. Elle avait de la difficulté à récupérer de ses entraînements ».

Si elle a déjoué les pronostics, c’est grâce à une longue période de repos avant le jour J et, surtout, grâce à une discipline de fer qu’elle maintient depuis des années. « Elle a un quotient intellectuel très élevé pour les sports. Elle sait comment ajuster son entraînement pour s’améliorer constamment », soutient Jacques Mainguy, qui cumule 45 années d’expérience dans le domaine.

Selon lui, Lucie Rochon fait partie d’une très rare catégorie d’athlètes qui améliorent leurs performances même en avançant en âge. « J’ai rarement vu cela dans ma carrière d’entraîneur. Elle court plus vite qu’il y a sept ou huit ans alors que normalement, les coureurs ralentissent en vieillissant. »

Une machine de sport

Qu’est-ce qui fait courir Lucie Rochon ? « Ce n’est pas toujours facile de sortir au froid et de se mettre à courir, répond-elle. Mais dès que j’enclenche la machine, ça me procure un grand bien-être. Ça m’énergise pour le reste de la journée. Pour moi, la course à pied est un mode de vie. »

La fonctionnaire à la retraite court cinq ou six fois par semaine, généralement le matin. Ça représente 3 000 kilomètres de course par année. Et c’est sans compter ses entraînements de musculation au gym et ses sorties de ski de fond et de vélo. Une vraie machine de sport.

Cette native de Québec a commencé à user ses espadrilles sur le pavé à l’adolescence, à une époque où personne ne courait ou presque, encore moins les filles.

« J’étais inspirée par mon père qui courait les midis sur la piste du PEPS [Pavillon de l’éducation physique et des sports] de l’Université Laval », raconte-t-elle. Devenue adulte et mère de trois enfants, elle court continuellement, sans trop se prendre au sérieux. À 45 ans, sous l’influence de la copine de son filleul, elle s’inscrit à un premier demi-marathon. Elle en fera un par année pendant une décennie. Sans plus.

Courir, son remède

À la mi-cinquantaine, elle encaisse un électrochoc avec le décès soudain de son conjoint, drame personnel sur lequel elle ne veut pas s’étendre. La course devient son remède pour passer à travers le deuil. Peu de temps après, elle court à 56 ans son premier marathon, celui de Toronto, avec un temps de 3 heures 28, un chrono du tonnerre qui la qualifie pour le marathon de Boston.

C’est là que la passion de la course à pied la happe à tout jamais. Peu de temps après, elle joint le club La Foulée, qui devient sa seconde famille. Cette femme de 5 pieds 1 pouce enchaîne les marathons en affichant toujours des performances remarquables, avec neuf podiums en 12 participations. « J’ai toujours le sentiment que mon conjoint me pousse dans le dos. Il m’accompagne dans les épreuves », confie-t-elle.

Lucie Rochon, une source d’inspiration

Sa motivation, elle la maintient grâce à son amélioration constante. « J’ai aussi la chance d’être épargnée par les blessures », ajoute-t-elle. Et son esprit compétitif n’est jamais loin derrière. « Dès qu’elle a joint le club, dit Jacques Mainguy, elle se mesurait à nos meilleurs athlètes. Elle était toujours en avant, avec les plus jeunes et les hommes. »

Avec ses performances, Lucie Rochon devient la tête d’affiche du club. « J’ai de jeunes coureurs qui se joignent à nous pour suivre ses traces. Elle est une source d’inspiration », dit Jacques Mainguy. Lucie Rochon en est fière, même si elle ne court pas pour la notoriété. « Si je peux inspirer des gens de mon âge à courir et à jouer dehors, tant mieux », dit celle qui est maintenant grand-mère d’un petit-fils.

Que lui réserve l’avenir ? « Tant que je vais pouvoir courir, je vais le faire ». Cet automne, elle ira au marathon de Chicago avec un groupe de La Foulée. Boston – où un autre podium serait un bonus –, et probablement New York devraient suivre en 2024. Lucie Rochon n’a pas fini de nous éblouir.

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