L’épicerie coûtera (encore) plus cher

Faire l’épicerie demeurera vraisemblablement une source d’inquiétude majeure pour bon nombre de ménages au pays en raison de la hausse du prix des aliments, prédit un récent rapport universitaire. Et les personnes aînées ne seront pas épargnées.

Par exemple, un couple composé d’un homme et d’une femme de 51 à 70 ans doit s’attendre à payer 7 711,63 $ pour s’alimenter sainement l’année prochaine, soit une hausse de 332,25 $ relativement à ce qui a été observé en 2023, indique le Rapport sur les prix alimentaires au Canada 2024.

Les hommes et les femmes de 70 ans et plus devront débourser respectivement 3 894,05 $ et 3 504,99 $ au courant des 12 prochains mois.

À travers le pays, les prix des aliments augmenteront en moyenne de 2,5 à 4,5 %. Mais les produits ne sont pas tous égaux devant la caisse enregistreuse. La viande, les légumes et les produits de boulangerie augmenteront le plus, avec des prix à la hausse de 5 à 7 %, lit-on dans la 14e édition de ce rapport annuel, rédigé par des équipes de l’Université Dalhousie, de l’Université de Guelph, de l’Université de la Saskatchewan et de l’Université de la Colombie-Britannique.

Les détaillants vont vous courtiser

La hausse globale anticipée du prix des aliments sera tout de même moins prononcée que celle observée l’année dernière (+ 5,9 %).

Cela est source d’optimisme pour Sylvain Charlebois, chef de projet et professeur à l’Université Dalhousie. Le spécialiste de l’industrie agroalimentaire anticipe d’ailleurs « que le champ de bataille en 2024 sera la loyauté ». Pour regagner la fidélité de la clientèle qui butine d’une épicerie à une autre à la recherche d’aubaines, les grandes bannières vont offrir plus de rabais et bonifier leurs programmes de récompenses. Une certaine guerre de prix entre les détaillants est donc à prévoir, notamment en ce qui concerne les denrées non périssables.

Malgré cela, l’inflation alimentaire continuera à exercer une pression sur le portefeuille, déjà mis à mal par l’augmentation des coûts du logement et de l’énergie, entre autres.

« Cette hausse anticipée des prix alimentaires peut être principalement attribuée à l’augmentation du coût des intrants, à l’accroissement des frais de transport et aux effets néfastes du changement climatique sur le rendement des cultures. »

Rapport sur les prix alimentaires au Canada 2024.  

Moins de dépenses

Malgré la hausse bien réelle des prix, la population canadienne a dépensé moins en 2023 que ce qui avait été prédit, soit une différence de – 328,10 $ pour un couple formé d’un homme et d’une femme de 51 à 70 ans.

« C’est le coût du logement qui a étouffé beaucoup de ménages, explique Sylvain Charlebois. Il y a donc carrément eu un retrait à l’épicerie. Les gens ont recalibré leur budget à la baisse, et c’est à l’épicerie qu’ils ont pu épargner. C’est là qu’on voit que l’année a été difficile pour beaucoup de personnes.  »

Cette diminution est surprenante, mais aussi inquiétante puisqu’elle indique que les ménages « réduisent leurs dépenses d’épicerie, soit en limitant la quantité ou la qualité des aliments qu’ils achètent, soit en les remplaçant par des produits substituts moins coûteux ».

Il est aussi probable que les gens changent certaines habitudes de consommation pour déjouer l’inflation, notamment en faisant leurs courses dans des magasins au rabais et en réduisant la quantité d’aliments gaspillés.

« C’est la fidélité qui a pris le bord en 2023; les gens achètent d’autres marques, dans d’autres magasins, explique Sylvain Charlebois. C’est un bouleversement qui s’est produit aussi rapidement que la hausse des taux d’intérêt. »

Le rapport souligne aussi que les ménages sous pression financière ont de plus en plus recours aux banques alimentaires, ce qui leur permet d’acquérir certaines denrées sans pour autant augmenter leurs dépenses. En effet, les Banques alimentaires du Québec ont récemment dévoilé que le réseau aide 872 000 personnes chaque mois, soit une augmentation de 73 % par rapport à 2019. Il y a aussi eu une augmentation de 98 % des services de dépannage alimentaire en quatre ans, passant de 345 000 à 682 000 paniers remis mensuellement. Au pays, environ 8 % des personnes qui font appel à des services de dépannage alimentaire ont 65 ans et plus.