Cancer du sein : « Une maladie dont je ne me méfiais pas »

Ça devait être un examen de routine. Une mammographie à l’image de toutes les autres que Marie Desroches avait passées depuis une quinzaine d’années. Comme d’habitude, elle s’attendait à des résultats normaux. Après tout, il n’y avait pas d’historique de cancer du sein dans sa famille…

« On m’a dit : “On pense que c’est cancéreux, il faut faire une biopsie” », raconte aujourd’hui la femme de 68 ans. Le soupçon s’est ensuite confirmé : cancer du sein. L’un des quelque 28 600 nouveaux cas détectés au pays en 2022.

« Je suis restée estomaquée, se souvient-elle près de deux ans après avoir reçu le diagnostic. C’est une maladie dont je ne me méfiais pas du tout. Tant du côté de mon père que de celui de ma mère, les femmes ont passé le cap des 90 – 100 ans sans en être atteintes. »

Une croyance tenace

« Oui, il y a des femmes qui pensent qu’elles sont moins à risque et qui disent vouloir arrêter la mammographie parce qu’il n’y en a pas dans la famille », confirme Marie-Claude Doré-Renaud, technologue spécialisée en imagerie médicale du sein. Selon elle, ce mythe a tendance à s’estomper en raison des campagnes de sensibilisation, mais il demeure présent.

L’absence d’antécédents familiaux est d’ailleurs l’un des principaux motifs évoqués par les femmes de 50 à 69 ans qui ne participent pas au Programme québécois de dépistage du cancer du sein, selon un sondage mené dans le cadre de la campagne Mémo-mamo, de la Société canadienne du cancer.

« Souvent, on va répondre à ces femmes que le cancer du sein doit bien commencer quelque part, que ça prend une première dans une famille, malheureusement, ajoute Janie Cyr, elle aussi technologue spécialisée en mammographie. Et ce ne sont pas tous les cancers qui sont génétiques, certains sont hormono-dépendants. Donc, même s’il n’y en a pas dans la famille, on peut être à risque de développer un cancer du sein. »

Détecter tôt, traiter vite

Marie Desroches croyait aussi que son arbre généalogique la mettait à l’abri du risque. Mais cette femme qui dit faire « confiance à la science et à la médecine » a choisi de suivre les recommandations des spécialistes en passant une mammographie bisannuelle. Une décision qui s’est avérée salutaire, selon celle qui a dû subir deux chirurgies et une radiothérapie préventive.

« Étant donné qu’il a été détecté de façon précoce, au stade 1, je n’ai pas eu de chimiothérapie. Je me suis trouvée tellement chanceuse d’avoir passé cet examen et de ne pas avoir permis au cancer de progresser. »

Selon les données du gouvernement du Québec, on déplore 13 décès sur 1 000 femmes qui participent au dépistage par mammographie aux deux ans, pendant 20 ans. Cela représente sept de moins que chez 1 000 femmes qui ne participent pas au dépistage.

Cependant, ces dernières années, des études remettent en question les bénéfices du dépistage systématique quant à la réduction de la mortalité. Les possibilités de surdiagnostic et les traitements inutiles qui en découlent alimentent aussi une certaine controverse.

Les technologues Janie Cyr et Marie-Claude Doré-Renaud s’entendent : les avantages du dépistage pèsent plus sur la balance que les inconvénients.

« Même s’il était vrai qu’on ne sauve pas plus de vies, il faut penser aux mastectomies, ablations de ganglions et traitements de chimiothérapie qu’on épargne à ces femmes en détectant précocement les cancers, sans compter les complications et les séquelles physiques et psychologiques qui sont évitées », soutient Mme Doré-Renaud.

Déconstruire les mythes

D’où l’importance de poursuivre les campagnes d’information et de sensibilisation.

« Il y a plusieurs fausses croyances qui circulent. Comme le mythe que la mammographie donne le cancer parce que c’est de la radiation, ou qu’une trop forte densité rend l’examen inutile. D’autres femmes craignent la procédure parce qu’elles pensent que le sein pourrait rester coincé dans le cas d’une panne de courant, par exemple. Nous, il faut qu’on déconstruise tout ça », explique Janie Cyr.

La peur de ressentir de la douleur est elle aussi un frein important chez certaines femmes. Sur ce point, Marie Desroches se veut rassurante.

« Je n’avais pas de craintes, se rappelle-t-elle en parlant de sa première mammographie, même si je savais que le sein serait aplati. Je n’ai pas trouvé ça douloureux. C’est inconfortable, oui, mais ça dure deux minutes. Deux petites minutes qui peuvent vous éviter tellement d’autres problèmes. »

La grand-mère de cinq enfants en sait quelque chose. Aujourd’hui, elle se porte bien et mène une vie aussi active qu’avant son diagnostic.

La campagne Mémo-mamo se poursuit jusque fin du mois d’octobre, soit celui de la sensibilisation au cancer du sein.