Ginette Reno : la route vers la guérison

Grâce à son talent et son travail acharné, Ginette Reno s’est bâti une carrière légendaire. Mais à l’âge de 77 ans, la chanteuse œuvre encore à déconstruire les croyances négatives qu’on lui a inculquées pendant l’enfance. Rencontre avec la grande dame de la chanson qui se livre sans filtre, avec son habituelle sincérité.

« En vieillissant, je fais d’énormes prises de conscience, confie Ginette Reno en entrevue avec Virage. En ce moment, j’essaie de comprendre ce qu’est la vie. » Cette quête de sens est au cœur de son autobiographie, parue au printemps dernier. Simplement intitulé Ginette, l’ouvrage lui a permis de revenir sur d’importants moments de son parcours, ainsi que sur les hauts et les bas qui ont rythmé sa vie.

« À huit ou neuf ans, je chantais pour quêter parce qu’il fallait que je rapporte de l’argent à la maison. À 11 ans, je faisais déjà du service domestique. À 13 ans, j’étais dans les clubs 52 semaines par année, se remémore-t-elle. Jeune, on me disait : “Il faut que tu fasses plaisir, que tu travailles, que tu donnes de l’argent. Sinon, personne ne va t’aimer…” . »

Avant, quand je chantais, c’était toujours comme si c’était la première fois. Maintenant, je chante comme si c’était la dernière… 

Ginette Reno

« J’ai été domptée, mal élevée… »

Malgré le passage des décennies, Ginette Reno est toujours marquée par sa relation avec sa mère.

« Elle se sentait persécutée. Elle était bipolaire. Quand elle était folle, on avait du plaisir, mais quand elle était dans son bas-fond, ce n’était pas toujours agréable… Avec elle, il fallait que tout soit parfait. Si je repassais, il ne fallait pas qu’il y ait un seul pli. J’ai tellement appris à me flageller… Je n’étais jamais correcte. Jamais. Si je brisais quelque chose, elle me disait : “Tu détruis tout !” »

Aujourd’hui, elle reconnaît avoir été « domptée » et « mal élevée ».

« Ma mère me disait que j’étais possédée du démon. Elle priait le bon Dieu pour qu’il vienne me chercher. J’étais dans un cul-de-sac. Je n’avais pas la permission de vivre. J’ai passé ma vie à demander la permission de vivre à tout le monde. Je la demande moins, mais j’ai encore besoin d’approbation. »

Un travail en continu

Même si la femme a cherché des réponses une grande partie de sa vie, le travail sur elle-même ne semble jamais se terminer. « J’ai fini par comprendre qu’en naissant, on a déjà de la valeur. Ce n’est pas nécessaire de la chercher à l’extérieur : tout est en nous. J’essaie maintenant d’aborder les choses autrement. »

Elle évoque notamment une profonde introspection effectuée lors de ses cinq années passées au monastère.

« C’est comme une psychanalyse. C’est long ! Je pense qu’on ne se connaît jamais complètement, et c’est peut-être mieux ainsi. J’ai beaucoup plus d’amour envers moi-même, de compassion. J’ai entrepris un travail holistique avec une amie. Elle m’a offert un cadre avec un aigle en me disant : “Arrête de penser que tu es une dinde : tu es un aigle”. Entre-temps, j’ai appris que le seul oiseau au monde qui vole encore dans la tempête, c’est l’aigle. Finalement, c’est une belle analogie, car moi aussi, j’ai volé dans la tempête… »

Un album au top

Aujourd’hui, Ginette Reno atteint un nouveau sommet. C’est tout moi, son 42e album en carrière, a franchi la barre des 40 000 exemplaires vendus, un résultat exceptionnel en cette période où l’industrie du disque bat de l’aile.

« Ce qui me touche le plus, ce sont les commentaires des gens, confie-t-elle au sujet de cet opus qui rassemble 14 pièces. Plusieurs me disent que c’est le meilleur à ce jour. De tous mes albums, il y en a 10 qui sont vraiment top : ils ont quelque chose de plus que les autres. Celui-là en fait partie. Avant, quand je chantais, c’était toujours comme si c’était la première fois. Maintenant, je chante comme si c’était la dernière… »

Mais n’allez pas croire qu’elle envisage la retraite. Manifestement en forme et confiante en l’avenir, la femme a toujours plusieurs projets. « J’aimerais ouvrir la maison Ginette Reno, une maison pour toutes les dépendances. On y enseignerait le chant, on y entendrait des conférences. J’ai aussi un projet de livre, d’album et de film d’animation. »

La saviez-vous ?
Dans ses temps libres, Ginette Reno aime jouer au jeu de crible, notamment lors d’activités organisées par la FADOQ, dont elle est membre.

L’essentiel c’est la santé

Ces dernières années, la chanteuse a connu quelques ennuis de santé, dont un infarctus en 2014. On lui a découvert récemment une arythmie cardiaque rare. « Je suis rendue avec plein de “ogues” », dit-elle avec humour pour résumer son état de santé : un pneumologue, un cardiologue, un gastroentérologue, un endocrinologue et un rythmologue ! Par reconnaissance envers le centre hospitalier où elle a été soignée, la chanteuse appuie la Fondation Hôpital Pierre-Boucher qui s’est inspirée d’une de ses chansons pour son slogan : L’essentiel c’est la santé.

De grands honneurs

En plus de 60 ans de carrière, Ginette a reçu d’innombrables récompenses, mais aussi de prestigieuses distinctions pour son apport à la culture d’ici et d’ailleurs. « Je suis fière de mes médailles », admet celle qui n’hésite pas à les porter. La dame a entre autres reçu la Légion d’honneur, elle a été faite Officière du Canada, Chevalière du Québec et Chevalière des arts et des lettres en France.

L’album C’est tout moi est disponible sur toutes les plateformes. L’autobiographie Ginette est publiée aux Éditions Cantaloupe. On se renseigne au ginettereno.com. On appuie la Fondation Hôpital Pierre-Boucher au fondationhpb.org.