Anxiété financière : et si nous changions notre rapport à l’argent?

Quel rapport psychologique à l’argent entretenez-vous? Si vos besoins de base sont comblés, cette relation explique sans doute le fait que vous ressentiez — ou non — de l’anxiété financière. D’ailleurs, à partir de quel seuil jugez-vous avoir assez d’argent?

Peu importe la période de sa vie ou son origine, trois « vitamines » psychologiques assurent le fonctionnement optimal de l’être humain. Si les besoins d’autonomie, de compétence et d’affiliation sociale augmentent le bien-être et les émotions positives, tout élément — l’argent y compris — qui ne satisfait pas ou qui réprime ces besoins innés et universels est susceptible d’engendrer plus d’anxiété, de dépression et de comportements antisociaux ou destructeurs.

Disciple de la théorie de l’autodétermination, Jacques Forest, psychologue organisationnel et professeur titulaire à l’École des sciences de la gestion de l’UQAM, a étudié le rapport à l’argent de nombreux individus. « Lorsque l’argent nous habite par comparaison sociale, par impulsivité ou pour surmonter ses doutes personnels, la relation et négative. Poursuivi par autonomie, liberté, loisir, fierté, équité, sécurité ou pour la famille, l’argent peut être positif. »

Le professeur Forest rapporte que des enquêtes démontrent qu’avec un revenu qui se situe entre 65 000 $ et 110 000 $ par année, on obtient l’effet maximal de l’argent sur le bonheur. « Comme psychologue organisationnel, je rencontre des gens qui gagnent un salaire variant entre 20 000 $ et les sept chiffres. Parmi les plus fortunés, certains m’ont confié être inquiets au sujet de l’argent, tandis que d’autres au revenu plus modeste se sont dits confortables. »

Plusieurs actions « qui font du bien »

Outre le contexte d’une personne qui tente de s’extraire de la pauvreté, dépassé un certain seuil de revenus, c’est donc le rapport psychologique à l’argent qui explique qu’un individu éprouve ou non de l’anxiété. Plutôt que de chercher à toujours vouloir accroître ses avoirs, il faut se questionner sur son niveau de satiété financière. Jacques Forest et son équipe ont par ailleurs voulu vérifier s’il était possible de modifier, chez des gens, leur rapport à l’argent.

« Nous avons fait des recommandations qui ont eu un effet statistiquement significatif. Nous avons invité les individus non pas à acquérir du matériel, mais à faire quatre autres choses : acheter des expériences; utiliser l’argent pour avoir plus de temps; investir dans sa sécurité; et effectuer des dépenses au profit des autres plutôt que pour soi-même. Ces interventions ont révélé que l’on pouvait s’entraîner à faire bon usage de l’argent », établit le psychologue.      

Le chercheur précise que les expériences créent de l’affiliation sociale chez une personne, en plus de l’amener à vivre une activité qui a été librement choisie (autonomie) et qui peut aussi conduire au développement de nouvelles habiletés (compétence). Employer l’argent pour se dégager de tâches désagréables, « calmer le petit hamster qui court dans sa tête », assurer sa sécurité et passer du temps avec ses proches peut changer le rapport à l’argent.

L’argent, source de stress

Chez les 55 ans et plus, au Québec, une personne sur trois (34 %) affirme que penser à ses finances personnelles provoque un sentiment d’anxiété, selon la plus récente mesure de l’indice d’anxiété financière de Centraide. Près d’une personne sondée sur quatre (27 %) remarque que discuter de ses finances peut lui causer des palpitations. De plus, 25 % des gens dans cette tranche d’âge préfèrent carrément ne pas penser à l’état de leurs finances personnelles.

Parmi les sources d’inquiétudes les plus fortes, notons le coût de l’alimentation (55 %), les frais liés à la santé dentaire et oculaire (42 %), ainsi que les dépenses relatives aux médicaments et aux soins de santé (39 %). Les répondantes et répondants ont aussi relevé les craintes de subir une grosse dépense imprévue (40 %) et de ne pas avoir assez d’argent de côté pour la retraite (35 %).

Ces données proviennent du plus récent indice d’anxiété financière de Centraide, réalisé en octobre 2023, en collaboration avec Léger. Vous souhaitez connaître votre niveau d’anxiété financière? Sur son site Web, Centraide présente un outil pour le mesurer. Il suffit de remplir le sondage, obtenir le résultat et le comparer à celui de la population québécoise.