Le sport après 60 ans: pousser la machine (sans la briser)

Que ce soit le pickleball, le hockey, le kayak ou la randonnée en montagne, l’activité physique est un excellent moyen de s’occuper à la retraite et de se maintenir en forme le plus longtemps possible. Après tout, il faut grouiller pour ne pas rouiller. Lorsqu’il est question de sport après 60 ans, peut-on pousser la machine sans risques?

L’hiver, Christine Latour fait de la raquette et du ski de fond; l’été, de la randonnée et du vélo. La jeune retraitée de 64 ans consacre au moins une heure par jour à l’activité physique, cinq jours par semaine. « Dès que la météo est favorable, je sens l’appel du dehors, raconte-t-elle. Ce n’est pas seulement mon corps qui en bénéficie, mais aussi mon moral; de retour chez moi, je suis débordante d’énergie. »

La sexagénaire ne ménage pas ses efforts. Mais comme toute personne de son âge, elle doit aussi composer avec un corps changeant, dont la masse musculaire et la densité osseuse diminuent. Sachant cela, devrait-elle réduirela durée et l’intensité de ses efforts physiques?

Préparer son corps à bouger

Pierre Boulay, professeur à la Faculté des sciences de l’activité physique de l’Université de Sherbrooke, croit que non, si l’on demeure conscient de nos limites et de nos besoins.

 « La pratique d’un sport ne doit pas être une activité isolée, mais encadrée dans un programme d’exercices de musculation et d’aérobie qui permettra de l’exercer en toute sécurité, explique le spécialiste. Surtout chez les 60 ans et plus, alors que le risque de blessure augmente. »

Garder la forme pour pratiquer un sport, et non pratiquer un sport pour être en forme, voilà la clé. Même les athlètes de haut niveau suivent un programme d’entraînement, pourquoi pas nous? 

 « Il ne faut pas se laisser décourager par les défis que pose une activité sportive, poursuit Pierre Boulay. Je connais un homme de 65 ans qui, malgré le désaccord de son entourage, s’est mis en tête de courir un marathon. Il y est parvenu non seulement en courant, mais en préparant son corps à courir; il a fait des exercices qui lui ont permis de renforcer graduellement sa musculature et sa capacité cardiorespiratoire. C’est sans grands risques qu’il a finalement atteint le fil d’arrivée. »

En fait, ce qu’il faut comprendre de cette approche est que l’on peut pousser la machine… à condition que ladite machine soit bien huilée!

Christine est une adepte de ce principe de base. Quand elle n’est pas sur les pistes ou les sentiers, elle fait des étirements, du Pilates et du yoga. « Je demande beaucoup à mon corps, je dois donc lui donner les moyens de répondre à mes attentes, dit-elle sagement. Je suis beaucoup plus en forme que je ne l’étais à 50 ans, alors que je me levais tôt le matin, stressée, pour aller au gym avant de commencer ma journée de travail », poursuit-elle.

Le cap des 70 ans

Entre l’âge de 70 et 75 ans, malgré notre bon vouloir, le corps se fait plus capricieux. De petits bobos surgissent, la récupération est plus lente et l’équilibre plus fragile, ouvrant la porte aux chutes, possiblement aux fractures. Mais ce n’est pas une raison d’accrocher ses patins ou de ranger sa raquette!

« Quand l’âge commence à vouloir contrôler notre corps, se garder en forme exige un effort supplémentaire, explique Pierre Boulay. Ralentir et même arrêter de bouger est la solution facile, mais on risque alors de s’aventurer dans une courbe insidieusement descendante ».

Ce qu’il faut retenir, poursuit l’expert, c’est que le corps n’est pas figé dans le temps. Il est toujours possible d’améliorer sa condition physique, ou encore de ralentir la perte imminente de la force musculaire et la capacité cardiorespiratoire normalement observées avec le vieillissement.

« Pour vous motiver, je propose de visualiser la personne que vous voulez être dans quelques années », conseille M. Boulay.

« Je ne voudrais pas revenir à la cinquantaine, avec cette impression de courir après le temps plutôt que de courir pour me maintenir en forme, souligne Christine. Aujourd’hui, à l’aube de mes 65 ans, je vois toutes les années qui sont devant moi, je me projette et je m’assure que mon corps puisse me suivre! »

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Jamais trop tard pour bouger

Commencer à pratiquer un sport dans la soixantaine peut sembler intimidant. « Si vous ne savez pas trop lequel choisir, n’ayez pas peur d’aller essayer plusieurs activités, conseille Pierre Boulay. Le plus important n’est pas d’en trouver une, mais de la maintenir. »  Inutile de tomber en amour avec un sport et cesser de le pratiquer une fois passé le coup de foudre. Et pas besoin de se compliquer la vie : marcher, nager, et même monter les escaliers sont des activités qui délient et renforcent la musculature.

Des doutes sur vos capacités? Pierre Boulay suggère de consulter une ou un kinésiologue, qui évaluera votre condition et pourra vous donner des trucs pour améliorer vos chances de pratiquer le sport dont vous rêvez, ou une activité adaptée à votre remise en forme… qui est un chemin à suivre, rappelons-le, pas une conquête de l’Everest! 

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Votre corps vous parle. Écoutez-le!

Avec l’âge, certaines précautions s’imposent. Par exemple, il peut être sage d’éviter de faire des mouvements brusques et répétitifs (ils augmentent le risque de développer des tendinites ou des bursites). Il faut aussi éviter le surentraînement. La diminution du nombre de séances hebdomadaires peut aussi être nécessaire si le corps envoie des signes de détresse. Passé 60 ans, si la résistance et l’endurance peuvent être maintenues en y investissant temps et énergie, le temps de récupération est irrémédiablement plus élevé. Soyez à l’écoute de toute douleur suspecte.