Dites-moi, Rose-Marie…

Exercer le métier de journaliste est un véritable privilège quand on a devant soi la psychologue Rose-Marie Charest, dont les propos sont profonds et sensés à tout coup. Il suffit de mettre l’enregistreuse en marche et de la lancer sur des sujets tels que les jeunes, le rôle de mère, le féminisme, ses modèles…

Comment aider notre jeunesse ?

« C’est notre responsabilité de permettre aux enfants d’aujourd’hui de participer pleinement à la société de demain. Cela veut dire entre autres d’augmenter le filet de sécurité, de sorte que les jeunes puissent plus facilement avoir accès à des services psychologiques. C’est vrai pour les jeunes qui abandonnent l’école, pour les jeunes qui parfois masquent un trouble anxieux en buvant de l’alcool ou en consommant de la drogue, etc.

« À un autre niveau, il y a ces jeunes qui se radicalisent. C’est rarement expliquer pleinement, mais ces jeunes posent ces gestes pour devenir des héros. Pour eux, accéder à ce statut en tuant est mieux que de n’être personne. Pour détecter ces pathologies à temps, il faut que tous les jeunes qui en ont besoin puissent être évalués. »

Qu’est-ce qu’une bonne mère ?

« Quand j’étais étudiante en psychologie, le thème des mauvaises mères était très à la mode. Tout était toujours la faute des mères. Un jour, j’ai lu qu’une bonne mère est une mère qui est suffisamment bonne. Ça a été une leçon de vie pour moi. Dans tout ce qu’on choisit de faire, on doit être suffisamment bonnes, sans chercher la perfection. Ça va aussi pour les hommes, bien entendu. »

Où en est le féminisme en 2015 ?

« L’absence de réflexion sur le féminisme m’inquiète. La libéralisation de la femme, c’était justement l’autorisation de créer de nouveaux modèles de femme, de famille, de couple. J’espère que les jeunes femmes vont prendre le temps de se demander ce qu’elles veulent faire de leur vie et réaliser qu’elles devront faire des deuils car on ne peut pas correspondre à la fois à tous les modèles idéaux. Il faut choisir ce qui nous ressemble le plus, même si c’est parfois exigeant. Chose certaine, féminisme et liberté devraient se marier davantage.

« Par ailleurs, en ce qui concerne le marché du travail, les hommes n’ont pas à nous faire le cadeau de nous laisser la place. De même, les femmes n’ont pas à prendre le pouvoir de la même manière que les hommes. »

Quelles femmes vous inspirent ?

« Les femmes qui osent aller où c’est dangereux, notamment celles qui oeuvrent en zone de guerre. Elles m’inspirent au moment où je dois faire face à d’autres types de dangers dans ma propre vie. J’admire Anne-Marie Dussault qui ose s’exposer soir après soir, faire autant d’entrevues sans complaisance et avec une grande rigueur intellectuelle.

« J’ai aussi eu plusieurs modèles féminins en psychologie, comme Thérèse Gouin Décarie, qui nous enseignait par l’exemple qu’il était possible de mener une carrière comme femmes. J’admire aussi les femmes qui évoluent dans le domaine financier, telles que Monique Leroux. De façon générale, je suis inspirée par les femmes qui explorent des domaines où on ne les verrait pas spontanément. »

Photo : Bruno Petrozza – Maquillage : Véronique Prud’homme