Réjouissant, le temps des Fêtes? Pas pour tout le monde. Pour certaines personnes, c’est plutôt le stress des Fêtes, soit un rendez-vous avec la solitude, la tristesse, l’anxiété, les craintes financières ou les chicanes de famille. Un phénomène beaucoup plus répandu qu’on le pense. Quelques conseils pour passer à travers Noël en prenant soin de soi.
C’est après la séparation de ses parents, alors qu’elle était adolescente, que Caroline a arrêté de ressentir l’esprit des Fêtes. « J’étais déchirée entre mon père et ma mère. Et comme c’était Noël, je devais avoir l’air de bonne humeur et accrocher un sourire à mon visage. Pourtant, cela ne reflétait pas du tout comment je me sentais. » Un décalage qui ne s’est pas estompé avec le temps.
Après sa propre séparation, ses enfants ont décidé de célébrer dans la famille de leur père, où les Fêtes étaient plus animées. Aujourd’hui grand-mère, Caroline a essayé de renouer avec ces traditions, sans succès. « C’était compliqué de réunir tout le monde et je trouvais cela vraiment lourd. Ma famille voyait bien que cela ne me plaisait pas. Aujourd’hui, je me dis que j’ai le droit de ne pas aimer Noël, sans me sentir coupable! »
Un phénomène courant
Caroline est loin d’être la seule à ne pas apprécier sapin, dinde et cadeaux enrubannés : en fait, selon certaines études, jusqu’à une personne sur trois éprouverait du stress à l’approche des Fêtes. Pour la psychologue et autrice Josée Jacques, le problème, c’est que les impératifs, les « tu devrais », pèsent trop lourd dans la balance. « À l’image de ce qu’on voit dans les publicités, tout le monde devrait être heureux, festif, présent et avoir le budget pour offrir des cadeaux. De même, les conflits devraient être gérés. » Un écart entre l’idéal et la réalité qui engendre déception, anxiété ou tristesse.
Quand ces sentiments pointent leur nez, c’est un signal : cela veut dire que certains besoins n’ont pas été comblés, note la psychologue. « Des besoins, il en existe une multitude. On peut avoir besoin de se connecter, de partager, de prendre du temps pour soi, de se reposer, de raffermir certains liens. On peut aussi avoir besoin de cohérence avec ses valeurs pour donner du sens à cet événement. Ce qui n’est pas toujours évident quand les petits-enfants développent 50 cadeaux en trois minutes, sans montrer de gratitude », illustre-t-elle.
Prendre soin de ses besoins
La psychologue suggère de prendre un moment d’introspection pour se demander ce qu’on peut faire pour prendre soin de ses besoins, en respectant ses priorités, son niveau d’énergie, son horaire, ses désirs, ses finances. En somme, pour créer quelque chose qui aura du sens pour nous. Cette réflexion nous permettra de déterminer une intention qui orientera nos décisions et nos actions.
« L’intention, ce n’est pas juste ce que je veux, mais aussi quels gestes je pose pour prendre soin de ce qui est important pour moi. Ça nous met dans un processus d’action. » Par exemple, si nous voulons transmettre le goût de la lecture à nos petits-enfants, on pourrait leur lire un conte avant l’arrivée du père Noël. Et si on désire se reposer, on se donne le droit de dire non à certaines invitations.
« L’objectif, c’est vraiment de revenir à ses valeurs, ses besoins ici et maintenant, et de s’affranchir des pressions sociales, dit Josée Jacques. Si mon intention, c’est de m’offrir une belle soirée en solo, je pourrais me préparer un repas spécial. Il y a plein de déclinaisons possibles. »
Ressentir des émotions
Le 15 décembre 1998, un accident de voiture a coûté la vie à la mère, la femme et la fille unique de Michel. Depuis, il n’a plus jamais fêté Noël. « Au bout de quelques années, j’ai aussi remis en question ma foi. Cette fête devenait donc uniquement païenne. » Aujourd’hui, il dédie chaque mois de décembre au recueillement. « J’entre en période d’hibernation et je consacre mes pensées à elles, à me plonger dans les bons souvenirs. »
Plusieurs personnes doivent composer avec le deuil pendant le temps de fêtes… Encore une fois, Josée Jacques suggère de laisser les impératifs au vestiaire et de se donner la permission de ressentir des émotions, même si elles ne sont pas joyeuses. « Si je suis triste parce quelqu’un est absent, qu’il me manque, je peux descendre au sous-sol pour aller jouer avec les enfants ou sortir le chien. Autrement dit, je peux prendre un moment de recul, pour respirer, réfléchir… »
Elle conseille aussi de profiter de cette période pour honorer la mémoire des disparus, en écoutant de la musique qu’ils aimaient ou en cuisinant leurs mets préférés. « Mais il faut également trouver une façon d’honorer la vie, en partageant un repas avec un ami, poursuit-elle, car c’est en se connectant avec le vivant qu’on réussit à traverser le deuil. »
Affronter la solitude
Le fait de parler fait beaucoup de bien, ajoute Lucie Brais, directrice générale de Tel-Écoute. C’est le principe même de cet organisme, qui, en plus de Tel-Écoute, gère une ligne destinée aux personnes aînées et une autre pour les gens endeuillés. « Parfois, c’est difficile de s’ouvrir avec celles et ceux autour de soi. Nos bénévoles, formés pour l’écoute active, sont disponibles 365 jours par année, de 10 h à 22 h. »
Pendant le temps des fêtes, le volume d’appels augmente sur la ligne destinée aux personnes âgées, note-t-elle. Et la solitude est l’un des plus importants motifs d’appel chez les 60 ans et plus. « On peut vivre dans une résidence de luxe, avec piscine et piano à queue, être entouré de plusieurs autres personnes et se sentir bien seul, » explique Lucie Brais. « C’est parfois même plus souffrant », renchérit Josée Jacques.
Pour briser l’isolement, la psychologue suggère de prendre l’initiative de créer un événement, en invitant une personne qui est seule, en faisant du bénévolat ou en se créant un espace-temps pour soi.
Encore une fois, c’est le moment de se connecter sur ses besoins et de choisir son intention. Un conseil qui vaut toute l’année durant!