
La génération X approche de la retraite. Ses membres auront-ils les moyens de maintenir leur niveau de vie une fois arrivés à cet âge? Rien n’est moins sûr. Survol.
La génération X est parfois qualifiée d’oubliée, voire de sacrifiée. Pourquoi? Parce qu’elle a dû faire face à l’une des récessions les plus sévères de l’après-guerre dès son entrée sur le marché du travail, dans les années 1980. Inflation, chômage à la hausse, taux d’intérêt élevés… Et la récession des années 1990 n’a pas facilité les choses.
Les conséquences sont lourdes : dans les années 2000, les X se retrouvaient souvent dans des emplois moins bien rémunérés, avec des conditions de travail inférieures à celles des baby-boomers. Pierre Fortin, économiste, souligne qu’ils ont été les derniers à profiter de la reprise économique.
À cela s’ajoutent des facteurs comme la mondialisation, l’essor des nouvelles technologies, la diminution des services sociaux et la disparition de nombreux régimes de retraite privés, créant ainsi un environnement économique instable et précaire. Résultat : la génération X a épargné beaucoup moins que les précédentes, et a vécu dans une plus grande insécurité financière. Selon le magazine Fortune, leurs conditions de vie sont moins favorables que celles de leurs parents et grands-parents.
Surconsommation et endettement
Dans une société d’hyperconsommation, la situation n’a fait qu’empirer. Lorsque la génération X a commencé à rattraper son retard financier et professionnel, elle avait aussi les responsabilités de jeunes parents. Aujourd’hui, bon nombre de X se retrouvent à la préretraite avec de lourdes dettes et un patrimoine limité.
En 2019, le ratio dette/revenu des X était de 220 % (ce qui signifie que les ménages devaient 2,20 $ pour chaque dollar de revenu disponible) contre 165 % pour les baby‑boomers. Toujours en 2019, les X avaient les dépenses de consommation les plus élevées, soit en moyenne 100 000 $. Cela les rend particulièrement vulnérables en cas de perte d’emploi.
Les X ont aussi de moins bons salaires que les millénariaux (personnes nées entre les années 1980 et 1990). En 1999, le revenu médian après impôt des X était de 51 000 $, contre 66 500 $ pour les Y en 2016, selon Statistique Canada.
Un espoir timide : la préparation à la retraite
Malgré tout, la génération X semble un peu mieux préparée que les baby-boomers pour la retraite, selon une étude de la firme Vanguard de 2023. Le patrimoine moyen des X (combinant placements et biens après déduction des dettes) a atteint 1,35 million de dollars en 2022, soit une hausse de 255 % en 10 ans. Ce chiffre dépasse de 100 000 $ celui des baby-boomers.
En 2024, la valeur nette totale des X dépassait 6,51 trillions de dollars (1,5 million de dollars par ménage), comparativement à 6,61 trillions pour les baby-boomers.
Malgré ces chiffres encourageants, la réalité reste préoccupante. Environ 28 % des X n’ont pas épargné pour leur retraite et 56 % envisagent de la repousser. De plus, 46 % des X ont encore une hypothèque. Une étude de Natixis Investment révèle que six X sur 10 estiment qu’il faudra un miracle pour leur assurer une retraite sécuritaire. Une enquête de Schroeder indique même que 53 % des X aux États-Unis devront continuer à travailler pendant leur retraite pour joindre les deux bouts.
Retarder sa retraite, mais à quel prix?
« Si tu travailles deux ans de plus sans réduire ton train de vie, ça n’arrange rien », commente Bertrand Rainville, conseiller au Centre d’intervention budgétaire et sociale de la Mauricie. Mais certains membres de la génération X ne peuvent pas repousser leur retraite : épuisés par les années de travail, ils sont souvent à bout de forces.
L’idéal est d’arriver à la retraite sans dettes ni hypothèque. Toutefois, chaque semaine, M. Rainville rencontre des personnes préretraitées ayant encore des marges de crédit hypothécaires et des cartes de crédit remplies. « Il faut changer ses comportements pour diminuer les dettes et augmenter l’épargne », conseille-t-il.
À 60 ans, il est encore possible d’agir, mais « il ne faut pas se culpabiliser », précise M. Rainville. Pour repartir sur de bonnes bases, une rencontre avec un conseiller pour établir un budget est essentielle. Cependant, pour qu’une stratégie soit réellement efficace, plusieurs séances s’échelonnant sur plusieurs mois sont nécessaires.
La réalité est donc claire : des millions de membres de la génération X n’auront d’autre choix que de repousser leur retraite de plusieurs années, voire de travailler à temps partiel bien après avoir dit bye-bye boss.