Avoir soixante ans, et après? Cinq personnalités se confient

Avoir 60 ans, qu’est-ce que ça change? Cinq personnalités qui ont récemment franchi ce cap symbolique ou qui l’atteindront au cours de l’année se confient franchement, voire étonnamment, sur leur âge. Tour à tour, ces néosexagénaires abordent leurs perceptions changeantes du succès, de la liberté, de l’être, de l’égalité et de l’authenticité.

Mario Jean

Humoriste et comédien

Mario Jean

Quand j’étais jeune, à 60 ans, je m’imaginais… : Je n’arrivais pas à m’imaginer à 60 ans. On dirait que quand tu es jeune, 60 ans, c’est presque la fin : c’est loin, c’est vieux, c’est la retraite, c’est la maladie. C’est drôle, je n’imaginais pas avoir autant d’énergie à 60 ans!

Est-ce qu’on change à 60 ans? Je ne trouve pas. Je n’ai pas un désir de changer autant que quand j’ai vécu ma quarantaine et ma cinquantaine, par exemple. Je n’ai pas de remise en question. On continue.

Quelle est ta perception du succès aujourd’hui? Il y a deux façons de voir le succès. Il y a le succès extrême où tu atteins un sommet très rapidement, où tu es partout et tu dépasses des frontières. Oui, j’ai été populaire, j’ai fait bien des trucs, mais je ne voulais pas atteindre ce succès-là et ensuite tomber dans l’oubli. Ma définition du succès, elle s’applique à n’importe qui. C’est faire ce qu’on aime le plus longtemps possible et continuer d’aimer notre travail et d’être pertinent.

Charles Gaudreau

Comédien et animateur

Charles Gaudreau

Quand j’étais jeune, à 60 ans, je m’imaginais… : Mort. Pour moi, 60 ans, c’était vieux. J’ai une photo de moi bébé, en 1964, avec ma grand-mère qui était née en 1900. Elle avait l’air tellement plus vieille! Et j’ai perdu mon père quand il avait 68 ans. Il est tombé malade à 62 ans. Pour ces raisons, c’est comme si j’avais intégré que 60 ans, c’était la fin de la vie. Aujourd’hui, je ne vois plus ça de la même manière!

Est-ce qu’on change à 60 ans? J’ai toujours eu le cœur à gauche, et ça reste toujours ainsi. Je réalise aussi que ma capacité à résoudre des problèmes est supérieure.

Quelle est ta perception de la liberté aujourd’hui? Ce n’est surtout pas monétaire. Pour moi, la liberté, c’est le fait d’exercer un métier que j’aime. C’est aussi de ne pas être considéré uniquement en fonction de mon âge. La vraie liberté, c’est de ne pas être catégorisé dans l’œil de l’autre, mais d’exister comme son égal.

Marie-Michelle Grenier

Avocate en protection de la jeunesse et présidente d’Aide aux Trans du Québec

Quand j’étais jeune, à 60 ans, je m’imaginais… : Je n’en avais aucune idée. Je pense que quand j’étais enfant, j’avais l’impression que je n’arriverais jamais jusque-là. Quand j’étais plus jeune et que je voyais des gens de 60 ans, c’étaient des vieux.

Est-ce qu’on change à 60 ans? Personnellement, c’est plus tôt que j’aurais voulu changer, vivre ma transition. Quand j’étais à l’adolescence, c’était considéré comme une maladie mentale. Heureusement, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Quand on la vit plus tard, on se retrouve avec un sentiment d’imposteur, au début. Mais maintenant, je suis en forme et de bonne humeur, pour toutes sortes de raisons! Je vais bien sans bon sens!

Marie-Michelle Grenier

Quelle est ta perception « d’être » aujourd’hui? Je suis née pour aider les gens. Ça m’a sauvé la vie d’être capable de faire en sorte que les personnes que je rencontre soient bien et heureuses. Je transmets ma bonne humeur! Je ressens une immense gratitude d’avoir la liberté d’être qui je veux, et je suis reconnaissante pour toutes les personnes qui, avant moi, se sont battues. Maintenant, je m’implique pour faire en sorte que ces droits qui ont été acquis, on ne les perde pas.

Jacques Létourneau

Syndicaliste et personnalité médiatique

Jacques Létourneau

Quand j’étais jeune, à 60 ans, je m’imaginais… : Je ne m’imaginais pas, je ne pensais pas à ça! Encore aujourd’hui, je ne réalise pas que j’ai 60 ans. 

Est-ce qu’on change à 60 ans? Je ne perçois pas de changements fondamentaux. Je demeure un éternel optimiste qui a foi en la société civile et en chaque individu.[J1] 

Quelle est ta perception de l’égalité aujourd’hui? Je trouve qu’on a régressé, quand on se compare à il y a une dizaine d’années. On n’est pas dans une belle période par rapport au masculinisme, à l’égalité entre les hommes et les femmes, l’égalité des chances ou l’égalité sociale. Mais j’ose espérer qu’il y a une lumière au bout du tunnel. Ma formation d’historien me fait croire que oui, mais il m’arrive de me demander si les trente à cinquante dernières années n’auront été qu’une parenthèse dans l’histoire de l’humanité.

Kim Richardson

Chanteuse et comédienne

Kim Richardson

Quand j’étais jeune, à 60 ans, je m’imaginais… : Vieillir ne m’a jamais effrayée. Pour ma mère et ma grand-mère, vieillir n’a pas été difficile. La génétique dans ma famille est généreuse : elles n’ont pas de rides! Je vois aussi que leur joie de vivre est toujours bien présente malgré les petits bobos, comme les maux de dos et de genoux. Je peux dire que 60 ans, ce n’est pas la fin du monde. Au contraire, c’est un bonus parce qu’on a la sagesse en plus.

Est-ce qu’on change à 60 ans? On pose un regard différent sur la vie. On ne s’attarde pas à des détails, on lâche les petits problèmes. L’important, c’est la santé, la famille et le bien-être en tout. On n’a pas de temps à perdre sur des choses futiles et des commentaires désobligeants. Ce n’est pas important!

Quelle est ta perception de l’authenticité aujourd’hui? Pour moi, ça signifie de paver mon propre chemin, de faire les choses à ma manière et de ne pas chercher à imiter les autres. C’est aussi pouvoir me regarder dans le miroir et me demander : « Est-ce que je suis bien? Est-ce que je suis heureuse? Est-ce que je suis bien dans ma peau? » Être authentique, c’est être confortable avec nos choix et avec ce qu’on fait.