Se réinventer, façon Anthony Kavanagh

À quelque chose malheur est bon, dit le proverbe. Une embolie doublée d’un infarctus pulmonaire, en 2017, a rappelé à Anthony Kavanagh qu’il devait impérativement mettre de l’avant tous les projets qui lui tenaient à cœur. Au tournant de la cinquantaine, l’artiste a ajouté quelques cordes à son arc, dont celle de la musique, avec le lancement d’une première chanson. Manifestement, la maladie aura provoqué un virage positif.

L’urgence de vivre… et de chanter

Anthony se félicite d’avoir enregistré son plus récent spectacle intitulé Showman : ça lui permet de nous l’offrir sur différentes plateformes et sur DVD. « Mon spectacle sera aussi diffusé à Radio-Canada en décembre, dit-il. Comme je suis producteur du projet, ça m’a beaucoup occupé pendant la pandémie. »

Du côté des prestations devant public, il a dû remettre à plus tard le rodage de son tout nouveau spectacle. « Je devais être en France, mais nous avons décalé les spectacles. Nous avançons un mois à la fois », explique-t-il.

Celui que nous connaissons comme humoriste s’est renouvelé au printemps dernier en nous présentant son premier single, Let you go. Un deuxième sortira sous peu. La chanson n’a rien d’anodin dans le parcours de l’humoriste qui, à la suite d’ennuis de santé, avait placé cet objectif tout en haut de sa liste de choses à faire avant de mourir, la fameuse bucket list.

La maladie, un déclencheur

« Il y a trois ans, j’ai fait une embolie et un infarctus pulmonaires, rappelle-t-il. Ça été un enchaînement de mauvaises circonstances. J’étais en spectacle en Nouvelle-Calédonie. Peu de temps avant, j’avais fait une cellulite à streptocoque et une bursite septique. On avait dû me mettre un cathéter dans le bras afin de recevoir des doses massives d’antibiotiques. La veille de mon voyage, j’ai fait retirer le cathéter. Puis, je me suis tapé 32 heures et demi d’avion. Je me suis fait masser en arrivant à l’hôtel, ce qui a sûrement contribué à déloger le caillot de sang qui s’était formé. J’ai eu de la chance : il s’est brisé en trois morceaux. J’ai failli mourir… », résume-t-il.

Ce choc l’a poussé à se poser des questions existentielles. Il fallait cesser de reporter certaines choses. « Depuis cet événement, même si je n’ai pas fait tout ce que je m’étais promis de faire sur le plan personnel et professionnel, j’en ai fait quand même pas mal, entre autres la musique… »

Sa cause : l’apnée du sommeil

C’est au sortir de ses problèmes de santé qu’on a proposé à Anthony d’assumer le rôle de parrain de l’Association pulmonaire du Québec (poumonquebec.ca). « Je souffre d’apnée du sommeil depuis au moins 35 ans, spécifie-t-il. J’ai tout de suite accepté parce que ça me touche personnellement. L’année dernière, nous nous sommes rendus à l’Assemblée nationale où j’ai parlé avec mon cœur de tous les problèmes que l’apnée du sommeil avait causés dans ma vie et dans la vie de millions de personnes à travers le monde. »

L’humoriste n’entend pas à rire lorsqu’il évoque la situation singulière qui prévaut ici. « Au Québec, les gens doivent payer pour se procurer une machine pour traiter l’apnée du sommeil alors que dans tous les pays développés, c’est remboursé par le gouvernement. Pourtant, on a démontré que le coût pour la société est encore plus élevé, car la maladie laisse des séquelles : épuisement, qualité de vie réduite, manque d’énergie. Certains deviennent même violents. »

Il explique qu’avant d’être traité pour l’apnée du sommeil, son ronflement atteignait 92 décibels. « C’est littéralement l’équivalent d’un marteau-piqueur ! Et je m’endormais partout : au cinéma, au théâtre. Pis encore : l’apnée du sommeil joue sur la confiance en soi. Je ne voulais pas me suicider, mais j’en avais marre de vivre… Tout me semblait lourd… »

Continuer à progresser

Anthony, qui vient à peine de célébrer ses 51 ans, croit que les changements de décennie suscitent des prises de conscience. « À chaque fois que notre âge se termine par un 0, ça crée un sentiment d’urgence, avance-t-il. Ça fait 31 ans que je pratique mon métier. J’ai besoin de faire autre chose dans la vie. »

Avec son prochain spectacle, il veut faire rire, mais pas que ça. « J’ai envie d’amener les gens à se sentir mieux et à gérer leur cerveau. Je veux leur donner des trucs que j’utilise moi-même et qui fonctionnent ! J’ai obtenu trois certifications : je suis maintenant coach en programmation neurolinguistique. J’ai même commencé à faire du coaching durant l’été. C’est bien de pouvoir aider les gens avec des outils tout simples. »

Et comment se pose-t-il face au temps qui passe, inexorablement ? « Je n’ai pas peur de vieillir, mais je ne veux pas mal vieillir. Et il a trois belles motivations pour demeurer longtemps en santé : son épouse et leurs deux enfants.

Du côté de la carrière, il veut continuer à se réinventer et à relever de nouveaux défis. « L’une des clés du bonheur, c’est de progresser. Il faut pouvoir se dire qu’on est une meilleure personne, qu’on a appris. Il faut s’aligner sur nos vraies valeurs car sinon, on est malheureux. On doit aussi faire face à ses peurs, car c’est de l’autre côté de la peur que se trouve le bonbon… »

Photo : Elizabeth Delage