« Quand j’étais enfant, je ne voulais pas me rendre à 60 ans, car pour moi c’était l’âge Soirée canadienne, avec des mononcles et des matantes habillés en beige et brun », raconte Michel Barrette. La tournée qu’il amorce avec son 11e spectacle en 33 ans de carrière, Drôle de vie, l’amènera au-delà de ce vénérable cap, qu’il tente d’apprivoiser en riant de lui et de ses pairs… nous !
Tout y passe : l’apparence, les différences au lit par rapport à sa femme de 20 ans sa cadette, l’impression de porter Météomédia sur lui tellement il a mal aux articulations avant le mauvais temps, le dilemme du port de la ceinture, en bas ou en haut de la bédaine, etc.
On en rit un coup avec cet humoriste qui ne manque pas d’interpeller son public sur la base de l’âge, mais qui se distingue surtout en étant la principale victime de ses spectacles. Il est vrai que quelques-uns de ses proches sont aussi écorchés, comme sa grand-mère qui pète comme un moteur Evinrude montant une côte sur un lac, mais on devine que c’est un tout petit peu exagéré…
En pleine forme
En fait, même Michel Barrette, le vrai, n’a pas grand-chose de commun avec le personnage qu’il incarne. « À la veille de mes 59 ans, je pète le feu et j’ai l’esprit vif. Je suis plus en forme que dans ma jeunesse, car je ne suis plus sur la brosse. Si les miroirs n’existaient pas, je penserais avoir encore 20 ans. »
Il y a toutefois quelques aspects du vieillissement que même ses grimaces les plus convaincantes n’arrivent pas à chasser. « Je n’aime pas sentir la mort comme une épée de Damoclès au-dessus de ma tête et je n’ai pas le goût qu’une maladie me ralentisse. Aussi, j’aurai toujours presque 50 ans de différence avec mon fils Jonathan, que je ne verrai pas vieillir jusqu’à l’âge que j’ai présentement. »
Tournée, télé, hôtel, Comedy Club…
À la fois humoriste, comédien, animateur et homme d’affaires, il affirme qu’il lui faudrait vivre jusqu’à 160 ans, minimum !, pour aller au bout de tous ses projets. Cela explique en partie pourquoi ce « gars de chars » vit à 100 km/h ou même à 100 m/h.
Ainsi, il a des dizaines de dates réservées pour sa tournée Drôle de vie, jusqu’en 2018. Ce printemps, il sera de retour à l’animation des rencontres simples et vraies de Viens-tu faire un tour ?, à Radio-Canada. « C’est la meilleure des trois saisons. Je mets au défi qui que ce soit de ne pas avoir les larmes aux yeux pendant l’épisode avec Mario Pelchat ou celui avec Chantal Fontaine. »
De plus, il s’amuse comme un fou à gérer, avec sa femme, l’hôtel Les Trois Tilleuls, à Saint-Marc-sur-Richelieu. « On a fait des rénovations pour rendre l’hôtel plus chic, plus intéressant et plus moderne. Mais on a aussi le souci de le rendre plus abordable, de permettre aux gens de le fréquenter sans se ruiner. » Pour ce faire, une salle de spectacle a entre autres été créée. Devinez qui y tient l’affiche, lorsque le temps lui permet ?
L’été dernier, il créait aussi le Comedy Club Michel Barrette, à Old Orchard Beach, dans la salle de réception du populaire resto Jimmy The Greek. « L’idée de spectacles en français à Old Orchard était un peu folle, mais ça a très bien fonctionné. Dans dix ans, je suis sûr qu’il y aura une programmation estivale complète. Dès l’été prochain, des adultes animeront les enfants pendant que leurs parents seront à mon spectacle. »
Vérification faite, contrairement à ce que Michel Barrette affirme dans son spectacle, ce n’est pas Mike Ward qui s’occupera des tout-petits. Ouf ! D’ailleurs, son monologue sur ses vacances d’été en famille à Old Orchard, étant jeune, est absolument hilarant pour quiconque a déjà vécu un tel scénario de véritable déménagement pour quelques jours de plage près d’une mer à vous geler les… os.
Il caresse aussi le projet de faire une émission ou un documentaire sur sa prochaine traversée de la mythique Route 66, la 10e. Plus tard, il voudrait aussi faire son propre Chemin de Compostelle : marcher de Montréal jusqu’au Saguenay – Lac-Saint-Jean de son cœur. Volontiers nostalgique, il revivrait ainsi sa vie à rebours et méditerait sur ses côtes, ses bouts sur le plat, ses tempêtes et ses périodes ensoleillées. Mais ça, c’est pour quand il sera vieux…
Un hommage et un duel
Toujours amoureux d’Old Orchard, où il passe un mois chaque été, Michel Barrette n’y sera pas le 25 juillet, car ce soir-là, Juste pour rire lui rendra hommage. « Je suis flatté mais j’ai peur qu’on m’ait jeté un mauvais sort, car le dernier à qui on a rendu hommage, Gilles Latulippe, est mort depuis ! Blague à part, François Morency, qui animera le gala, a promis de me faire pleurer et je suis sûr qu’il va réussir. »
Deux jours auparavant, Michel sera sur scène dans le cadre du gala Jeune vs Vieux de la série Les rivalités des Québécois du Festival Juste pour rire. Lui, ce sera le vieux. Son opposant : Philippe Bond. « Comptez sur moi pour démontrer que l’expérience vaut cher et que les jeunes n’ont encore rien compris de la vie. »
N’empêche, si on lui permettait de revivre un an de sa vie, il choisirait ses 20 ans, mais pas aujourd’hui, en 1977. Et pour cause : à cette époque, jure le maître conteur et as de l’impro, avec 10 $, on pouvait se payer trois grosses bières, 24 verres de bière en fût, une demi pizza extra large et la ride de retour en taxi !
« En 1977, il devait y avoir 100 bars rue Sacré-Cœur, à Alma, à commencer par l’hôtel Royal, avec ses trois bars sur trois étages, dont celui des hippies, où je dansais en pieds de bas. Signe des temps, l’hôtel a été démoli et remplacé par une résidence pour personnes âgées ! »