Ne le dites pas aux tout-petits : le père Noël, le vrai, n’habite pas au pôle Nord. Mère Noël et lui résident à Saint-Louis-de-Gonzague, à une quinzaine de minutes de traîneau de Salaberry-de-Valleyfield. Pour passer incognito en-dehors de la saison des fêtes, il se fait appeler Jacques Dignard et est président de la FADOQ – Région Rive-Sud-Suroît. Mais sa longue barbe blanche le trahit…
Lorsque j’ai rencontré Estelle et Jacques Dignard, fin septembre, il faisait un temps radieux et particulièrement chaud. Qu’importe, les deux jeunes de cœur languissaient déjà qu’arrive enfin décembre, le plus beau mois de l’année à leurs yeux. Pourtant, ils ne sont friands ni du froid ni de la neige. Mais ils tardent à revoir les jolis minois qu’ils côtoient par centaines à l’approche des fêtes.
« Je suis attendu à au moins 25 endroits encore cette année, un peu partout dans la région : garderies, écoles, centres communautaires, maisons privées et même résidences pour aînés », se délecte M. Dignard. Son agenda est noir de rendez-vous, particulièrement les 24 et 25 décembre, alors qu’il sera en service de 9 h le matin… jusqu’à épuisement des rennes !
Du rouge, du blanc… et des yeux brillants
Ça a commencé tout naturellement, il y a près de 20 ans, sa barbe blanche le prédestinant à des demandes de cette nature. Il faut dire aussi que son tarif est imbattable : rien du tout ! « Ma récompense, c’est de voir la réaction des enfants quand je les prends sur mes genoux. J’aime faire ma part pour perpétuer la magie de Noël », dit M. Dignard.
Estelle et Jacques sont vite devenus accros aux yeux brillants des tout-petits et à ce contact privilégié avec ce que l’enfance a de plus beau. Ce bénévolat rejoignait aussi le plaisir qu’un et l’autre éprouvent à se déguiser. Ainsi, en plus d’avoir cousu ses propres atours, mère Noël a fabriqué les trois costumes que père Noël a usés jusqu’à présent. Elle lui a aussi confectionné des vêtements d’été, pour le Noël des campeurs ! Dans tous les cas, le Bouton argenté FADOQ est bien en vue dans cette symphonie de rouge et de blanc.
Estelle et Jacques font aussi des lutins d’eux-mêmes, le temps de fabriquer, dans leur atelier, les cadeaux qu’ils offrent à leurs 14 petits-enfants et à leur arrière-petit-fils : pyjamas et robes de nuit, patères, napperons personnalisés, etc. Les plus jeunes d’entre eux n’y voient d’ailleurs que du feu quand papi disparaît durant le réveillon et que le père Noël arrive peu de temps après…
Rendez-vous au Marché de Noël
Parfois père Noël est requis seul, parfois avec sa douce moitié. Toutefois, leur plus gros mandat, ils le font ensemble : le Marché de Noël de Salaberry-de-Valleyfield. Depuis quelques années, ils y accueillent plus de 1 000 enfants en trois jours, à l’extérieur.
« L’an dernier, il y avait sans arrêt une longue file d’attente. Les organisateurs nous ont convaincus de prendre une heure pour dîner. Toutefois, nous étions de retour après quelques minutes, car on ne voulait pas faire patienter les enfants trop longtemps ! », se souvient Mme Dignard. En décembre de cette année, ils seront au poste le vendredi 9 décembre, de 18 h à 21 h ainsi que le samedi 10 et le dimanche 11, de 10 h à 16 h.
Avec sa vraie barbe et son costume soigné, incluant bottes de cuir et lunettes véritables, M. Dignard a du succès même auprès des petits futés qui, à six ou sept ans, commencent à douter de l’existence d’un vrai père Noël. « Je leur dis : « Tire sur ma barbe ! » Alors, ils sont convaincus pour une autre année ! », blague celui qui, en plus de présider le regroupement régional FADOQ Rive-Sud-Suroît depuis 2013, est aussi formateur dans le cadre des Ateliers FADOQ.ca, à Salaberry-de-Valleyfield.
Des confidences touchantes
Toutefois, la vie de père Noël n’est pas faite que de câlins et de bisous. Il y a aussi de ces confidences touchantes qui requièrent sur-le-champ que le psychologue en lui se manifeste. « Des enfants m’ont dit qu’ils ne voulaient pas de cadeau, juste que leurs parents reviennent ensemble. D’autres demandent des cadeaux dispendieux mais que visiblement leurs parents ne peuvent leur offrir. Un jour, une adolescente ayant une déficience intellectuelle a même fait appel à moi pour lui trouver une famille d’accueil qui la garderait longtemps, pour une fois… »
À l’autre bout du spectre, il y a ce malaise ressenti au moment de distribuer une montagne de cadeaux à un ou deux enfants. « Ils regardent à peine le jouet qu’ils viennent de déballer puis, en vitesse, ils passent à l’autre. On s’éloigne du sens de Noël », déplore M. Dignard.
Il y a également ces personnes moins choyées par la vie, qui demandent une attention spéciale, dont des handicapés jeunes et adultes. Par exemple, depuis quatre ans, ils font une apparition remarquée à la fête de Noël dans la classe de sa fille, qui enseigne à des autistes.
« Pour chaque jeune, il y a des consignes à respecter afin de ne pas les effrayer et d’entrer un peu en communication avec eux, même ceux qui sont non verbaux. Nous gardons le sourire, mais après, nous demeurons ébranlés pendant des heures », confie M. Dignard.
Ces visites à haut coefficient d’émotions de toutes sortes ont d’ailleurs valu au couple le titre de bénévoles de l’année décerné par le Comité consultatif des services aux élèves handicapés et aux élèves en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage de leur commission scolaire.
La retraite, non merci !
Mère et père Noël envisagent-ils de passer le flambeau à d’autres pour renouer avec un mois de décembre moins frénétique ? Pas du tout ! « Tant que le bon Dieu va le vouloir, on va continuer ! » D’ici là, chaque Noël promet d’être joyeux…