Quelle proportion des hommes dans la cinquantaine ou la soixantaine vit des problèmes d’érection, de légers à graves ? 10 % ? 20 % ? Eh non : 40 % ! On lève le drap sur ce sujet tabou avec l’urologue Serge Carrier.
« La dysfonction érectile augmente avec l’âge, si bien qu’à 70 ans, les deux tiers des hommes sont touchés par ce problème. Dans la majorité des cas, la dysfonction érectile est légère, soit sept érections sur dix tentatives, à modérée, soit cinq sur dix », explique d’emblée le Dr Carrier.
Mais attention, la dysfonction érectile ne fait pas partie pour autant du processus normal de vieillissement. L’urologue souligne qu’un homme en bonne santé peut avoir des érections jusqu’à sa mort. À preuve, un patient l’a déjà consulté car il commençait à avoir des pannes occasionnelles à… 92 ans !
Ce qui change avec l’âge, toutefois, c’est le degré de rigidité et la période réfractaire. Chez l’homme, c’est la période durant laquelle il ne peut avoir d’érection après une relation sexuelle. À 50 ans, elle se situe entre 12 h et 24 h et à 70 ans, elle peut être de 48 h, note Dr Carrier. Il ne faut pas confondre ce « repos forcé » avec la dysfonction érectile.
Parlez-en… avec votre médecin
« L’érection est l’expression de la santé globale de l’homme, d’où l’importance de consulter son médecin en présence de dysfonction érectile », fait-il valoir, en déplorant que les hommes aient tendance à ne pas bien prendre soin de leur santé.
Il explique que la dysfonction érectile est souvent le symptôme d’enjeux de santé plus graves, principalement le diabète et le blocage progressif des artères. « Si des problèmes artériels causent la dysfonction érectile, dans 40 % des cas les hommes feront face à de l’angine du cœur ou à des problèmes cardiaques dans les trois à cinq années suivantes, s’il n’y a pas de changement majeur dans leur hygiène de vie », prévient l’urologue.
Outre le diabète et les problèmes vasculaires (athérosclérose, hypertension…), la dysfonction érectile peut aussi être causée par les divers traitements du cancer de la prostate, la prise de certains médicaments, le cancer du rectum et certaines maladies neurologiques. Par ailleurs, 9 % des hommes vont développer une courbure du pénis (maladie de La Peyronie) qui peut nuire à l’érection.
Le style de vie est également à montrer du doigt : tabagisme, drogues, consommation excessive d’alcool, sédentarité, obésité, etc.
Un problème physique… et psychologique
Les difficultés d’érection sont d’ordre physique dans 90 % des cas et d’ordre psychologique pour le reste. Toutefois, nous explique le Dr Carrier, une composante psychologique est présente dans la majorité des cas physiques. En effet, après quelques pannes, une certaine anxiété de performance peut contribuer à aggraver la situation.
Les facteurs psychologiques sont nombreux. Il y a le stress, la fatigue, et bien sûr la diminution du désir sexuel. Celle-ci peut être attribuable à une baisse de la testostérone, à un manque d’attirance envers le ou la partenaire ou encore à une relation qui bat de l’aile.
« Si un couple se chicane tout le temps, ce n’est pas très bon pour la libido », résume l’urologue. Consulter un psychologue ou un sexologue peut aider à atténuer à la fois les problèmes de couple et les problèmes érectiles.
Parlez-en… avec votre partenaire
D’ailleurs, il importe que le couple parle ouvertement des pannes érectiles, en termes bienveillants. Garder le silence entretient le malaise, ce qui peut entraîner des relations sexuelles moins fréquentes. Pour dédramatiser, le ou la partenaire peut par exemple dire que ce sont des choses qui arrivent, puis suggérer de consulter si ça se produit à répétition.
Serge Carrier ne doute pas une seconde que les efforts de toutes sortes pour traiter la dysfonction érectile en valent le coup. « Les couples qui ont des relations sexuelles régulières sont plus heureux et vivent plus vieux ! », conclut-il
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98 % des cas sont traitables
Si la prévalence de la dysfonction érectile étonne, une autre statistique est plus surprenante encore. Selon le Dr Carrier, ce problème est traitable dans 98 % des cas. L’urologue insiste sur le mot « traitable », car on ne peut en guérir, à moins de s’attaquer sérieusement aux facteurs de risque évitables liés aux habitudes de vie.
Dans 60 % des cas, les hommes obtiennent de bons résultats en utilisant des pilules – Viagra, Cialis ou Levitra – à un coût de 12 $ à 13 $ l’unité. « Magasinez votre pharmacie ! », conseille l’urologue. Les médicaments génériques sont vendus à peu près au même prix.
Pour les 40 % qui n’ont pas de succès avec ces médicaments oraux, il y a quatre possibilités :
- Une pompe à vide externe, qui sert à pomper le sang dans le pénis. On maintient ensuite l’érection avec un élastique. Ce système fonctionne pour 80 % des utilisateurs. Coût : 150 $ à 350 $.
- Le suppositoire Muse, qu’on insère dans l’urètre pour faire dilater les artères du pénis. Environ 20 à 25 % des hommes qui l’utilisent en sont satisfaits. Coût : 35 $ par suppositoire.
- Caverject, une injection que l’homme se fait dans le pénis et qui fonctionne pour 80 à 85 % d’entre eux. Coût : 150 $ pour une bouteille (5 à 15 injections).
- En dernier recours, lorsque toutes les autres méthodes ont échoué, il y a le bistouri. Un implant pénien semi-rigide ou gonflable procure un taux de satisfaction de 80 à 85 %. Coût : couvert par la Régie de l’assurance maladie du Québec.