Entrer dans l’église où ses ancêtres se sont mariés, voir le port où ils se sont embarqués, suivre leurs pas dans la rue où ils ont vécu et, avec un peu de chance, retrouver leur maison. Le tourisme généalogique suscite de bien belles émotions.
« Différents facteurs sociaux expliquent un intérêt croissant pour le tourisme généalogique », expose Pascale Marcotte, professeure agrégée au département de géographie de l’Université Laval, qui enseigne notamment en tourisme culturel.
La population est éduquée, rompue à la recherche sur Internet et habituée de voyager. De plus, la génération des boomers, en vieillissant, s’intéresse davantage à l’histoire. On observe aussi une transformation de la famille, plus mobile, qui pousse à chercher ses racines pour mieux comprendre. De plus, les bases de données et les archives numérisées rendent accessible une quantité impressionnante de documents sans qu’il soit nécessaire d’être un historien.
Josée Tétreault est passionnée par la recherche. Elle organise, aux deux ans, un périple en France pour la Société généalogique canadienne-française. On peut se joindre à eux pour apprivoiser le tourisme généalogique en groupe avec des activités déjà organisées. Au programme : congrès national de généalogie, puis départ vers un circuit touristique parsemé de fêtes de villages, de rencontres avec des associations d’histoire et de visites de centres d’archives départementales. Vu le nombre de participants, le fil directeur n’est toutefois pas celui d’une famille, il est plutôt thématique.
Remonter sa lignée jusqu’au premier arrivant
Pour suivre les traces de ses propres ancêtres, on fera préalablement quelques recherches. Pour marcher dans leurs pas et respirer le même air qu’eux, il faut s’assurer d’être à la bonne place, c’est-à-dire de les avoir identifiés avec certitude. Les actes de mariage authentifient la filiation et assurent qu’on remonte la bonne lignée, car on mentionne, dans les registres civils et religieux, qui sont les parents des mariés.
Sur le site Web de la Fédération québécoise des sociétés de généalogie (federationgenealogie.qc.ca), un tableau interactif nous aidera à trouver celle de notre région, où l’on profitera d’une bibliothèque bien garnie de documents de toutes sortes, de postes de travail informatisés avec accès à des bases de données généalogiques, et surtout, de l’aide de bénévoles pour apprendre comment s’y retrouver. Chez soi, on peut s’abonner à peu de frais sur une base mensuelle ou même quotidienne au site genealogiequebec.com, pour fouiller les bases de données et les archives de l’Institut Drouin.
De ses parents, puis de ses grands-parents, on remonte une génération à la fois jusqu’au premier arrivant qui porte notre patronyme, souvent en quelques heures seulement. Plusieurs chercheurs en généalogie ont déjà publié les histoires des premiers arrivants européens. Lorsqu’on a identifié nos propres aïeuls, on peut y trouver des informations intéressantes à leur sujet.
Les probabilités sont grandes que nos ancêtres soient arrivés de France. Avant de se rendre en Normandie ou dans le Poitou-Charentes, il faut toutefois se préparer pour retirer le maximum de son voyage.
Établir des contacts
« L’important c’est d’établir des contacts », conseille Josée Tétreault. Sur le site Web de la Fédération des associations de familles du Québec (fafq.org), on trouvera un lien avec plus de 200 associations de familles.
« Il est très probable que des membres de cette famille soient déjà allés en France dans le village de l’ancêtre. Ils pourront vous indiquer quoi voir et qui rencontrer. Communiquez aussi avec l’Association Québec-France. Quelqu’un se fera un plaisir de vous accompagner dans le village pour vous mettre en contact avec des gens de la place », dit Josée Tétreault.
Pascale Marcotte recommande d’étoffer son dossier avant de partir en repérant les lieux aussi précisément que possible et en s’informant des horaires d’ouverture. Quelle déception, en effet, de se cogner le nez sur une porte d’église fermée pour la journée ou pour des rénovations. « Un voyage généalogique est un investissement financier mais aussi un investissement émotif important », dit-elle.
« Soyez fonceur et curieux. Allez à la mairie, demandez si vous pouvez parler à un historien qui connaît le village. Il faut souvent aller chercher la clé pour entrer à l’église, voilà une belle occasion de discuter avec quelqu’un de la place. Ce sont les contacts humains qui rendent ce genre de voyage intéressant », ajoute l’historien et généalogiste Marcel Fournier, auteur du livre Retracez vos ancêtres.
« En France, poursuit Josée Tétreault, il y a toujours des gens dans le cimetière. Allez jaser avec eux, dites-leur que votre ancêtre a vécu dans ce village. Les Français aiment bien les Québécois. Ils sont fiers de nous recevoir. »
« Aller dans son village d’origine et celui de son conjoint, ça fait déjà deux pôles à visiter », dit Marcel Fournier. On repère sur Internet une place qui porte le nom de son ancêtre, un endroit où une plaque commémorative a été installée. On utilise Google Maps pour localiser les lieux et un GPS pour s’y retrouver une fois sur place.
En Écosse et en Irlande
Vous avez découvert que votre ancêtre vient d’Écosse ? « Ce pays a mené des études sur les retombées économiques du tourisme généalogique et développé des produits pour faciliter la venue des visiteurs en quête d’informations sur l’histoire de leur famille », souligne Pascale Marcotte.
Ainsi, le Burns Monument Center, à Kilmarnock, un centre d’archives et d’histoire familiale soutenu par l’Office du tourisme, donne accès à 500 ans de documentation et à du personnel. Aussi à consulter : le visitscotland.com et le visitscotland.org
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Le tourisme généalogique en terre d’Amérique
Il n’est pas nécessaire de traverser l’Atlantique pour faire du tourisme généalogique. En remontant notre lignée on peut identifier les régions du Québec où plusieurs de nos ancêtres ont vécu et se préparer un circuit personnalisé. Plusieurs familles québécoises ont également des racines acadiennes. Il sera alors intéressant d’aller faire un tour en Nouvelle-Écosse dans les alentours de Port-Royal.
Ayant constaté que plusieurs visiteurs s’y rendent sur les traces de leur famille, la région de Kamouraska s’intéresse au développement du tourisme généalogique sur son territoire, où, selon Alexandre Bibeau, agent de développement au Parc régional du Haut-Pays de Kamouraska, près de 50 % des Québécois auraient des racines. Parmi les familles souches dont l’histoire passe par cette région, il mentionne les Ouellet, Lizotte, Lévesque, Michaud, Dionne, Soucy, Pelletier, Plourde, Harding et King. On avance l’idée d’un tour guidé inspiré du nom d’une famille souche. En attendant, il est possible d’obtenir de l’aide aux Archives de la Côte-du-Sud, à La Pocatière.