
Antioxydantes, antivirales, antiseptiques, raffermissantes… Les huiles essentielles auraient mille et une vertus, en plus d’améliorer le sommeil et la mémoire, et de réduire l’anxiété. Qu’en est-il réellement?
« L’aromathérapie, c’est l’utilisation thérapeutique de la fraction odorante d’une plante, extraite de différentes façons, qu’on appelle généralement huile essentielle », résume Véronik Tanguay, naturopathe spécialisée en aromathérapie, auteure et formatrice.
En fait, les plantes aromatiques produisent certaines molécules pour attirer les pollinisateurs, mais aussi pour se défendre contre leurs agresseurs, comme les champignons, les virus ou autres, ajoute Isabelle Louis XVI, aromathérapeute et naturopathe agréée. Ce sont ces bienfaits qu’on tente d’encapsuler et d’utiliser pour améliorer la santé humaine. Et cela se fait, sous une forme ou une autre, depuis la nuit des temps, poursuit celle qui est responsable des communications à l’Association des naturopathes agréés du Québec.
Une science, vraiment?
Face à ces nombreuses vertus alléguées, la prudence est de mise, fait valoir Jonathan Jarry, communicateur scientifique de l’Organisation pour la science et la société de l’Université McGill. Le problème, explique-t-il, c’est que les démonstrations des bienfaits des huiles essentielles pour la santé proviennent généralement d’études menées en laboratoire, ce qui n’est pas suffisant pour présumer de leur effet chez l’humain.
Il est donc impossible d’utiliser ces données « hyperpréliminaires » pour conclure qu’une huile essentielle pourrait guérir la grippe, donne-t-il en exemple. « Oui, on peut tuer des germes de plusieurs façons en laboratoire, mais cela ne signifie pas que ces résultats sont transposables à l’être humain, car l’huile essentielle doit être métabolisée correctement, être sans danger et capable de tuer le virus. Et, ajoute-t-il, lorsque des études cliniques sont menées, elles sont souvent de piètre qualité. »
Néanmoins, certaines recherches sont en cours, notamment à la Fondation Armand-Frappier, fait valoir Véronik Tanguay. De plus, arguent les deux aromathérapeutes, l’intérêt des entreprises pour la recherche demeure limité, puisqu’elles ne peuvent pas breveter les molécules présentes dans les plantes.
Jouer de prudence
Envie d’essayer l’aromathérapie? On applique le principe de précaution. « Ce n’est pas parce que ce sont des produits naturels qu’ils sont sans danger », rappelle Jonathan Jarry. En effet, certaines huiles sont toxiques ou peuvent irriter la peau. Avant d’en tester une, mieux vaut se renseigner sur ses contre-indications et ses effets secondaires. Par exemple, toutes les huiles essentielles d’agrumes, telles que l’orange, le citron ou la bergamote, sont photosensibilisantes : il faut donc éviter de s’exposer au soleil pendant plusieurs heures après en avoir appliqué sur sa peau. Pour en savoir plus, on consulte les instructions du fabricant ou on demande conseil à une ou un aromathérapeute.
De plus, comme les huiles essentielles sont ultraconcentrées, il faut les diluer avant de les intégrer à une crème ou à une huile de massage (une proportion qui peut varier selon le produit). « On teste aussi ce mélange sur la peau du poignet, pour s’assurer qu’il n’entraîne pas de réaction cutanée ou allergique », recommande Isabelle Louis XVI. Et on veille à se procurer une huile de qualité, provenant d’une compagnie reconnue.
Toutefois, pour Isabelle Louis XVI, c’est encore par leurs odeurs que les huiles essentielles se révèlent les plus efficaces. « On peut en déposer une goutte dans ses mains et les frotter. Ensuite, on forme une coupe qu’on porte au nez et on inspire quelques fois. Si on a mal à la gorge, on peut même respirer par la bouche. » Encore une fois, on vérifie s’il faut la diluer ou si elle risque d’irriter les voies respiratoires.
Ajouter quatre ou cinq gouttes dans un diffuseur, ou sept ou huit gouttes dans une tasse de sel d’Epsom à dissoudre dans le bain, permet aussi de profiter de leurs arômes de manière plus indirecte, donc plus douce.
Quelques huiles essentielles à tester
Même s’il ne s’agit pas d’un remède miracle, les huiles essentielles peuvent s’avérer utiles pour apaiser certains maux liés au vieillissement. « Beaucoup sont riches en antioxydants, notamment en polyphénols comme les phénols, qui protègent l’organisme contre les radicaux libres, explique Véronik Tanguay. Elles peuvent aussi soulager les douleurs musculaires ou articulaires. » Nos deux expertes en recommandent quelques-unes à avoir dans sa trousse de soins naturels.
La lavande
« Si vous ne deviez en avoir qu’une seule à la maison, je vous conseillerais la lavande », affirme Isabelle Louis XVI. Cicatrisante et antiseptique, cette huile essentielle soulage les piqûres d’insectes, les coupures et les courbatures. On peut aussi en appliquer sur le ventre en cas d’inconfort digestif. Reconnue pour ses propriétés apaisantes, la lavande est aussi une alliée antirides, souligne Véronik Tanguay. « Cela s’explique par sa forte concentration en linalol, une molécule qui agit comme astringent cutané. Elle raffermit donc la peau. »
Le citron
L’huile essentielle de citron, Isabelle Louis XVI l’utilise comme nettoyant. Une façon de joindre l’utile à l’agréable : on profite de ses pouvoirs détachants et dégraissants, tout en bénéficiant de son odeur ensoleillée. Parfait pour dynamiser ses journées.
Le thé des bois
« Le thé des bois est un anti-inflammatoire exceptionnel pour soulager les douleurs musculaires et articulaires. Cet effet est dû à sa molécule principale, le salicylate de méthyle, qu’on retrouve sous forme synthétique dans les antiphlogistiques », explique Véronik Tanguay. Elle recommande aussi cette huile aux personnes qui ont souvent les extrémités froides : « On peut la diluer, s’en frictionner les pieds et enfiler des bas avant de se coucher. Cela activera la circulation. »
La menthe poivrée
Tout comme le thé des bois, la menthe poivrée procure une sensation de fraîcheur sur la peau, idéale pour soulager les douleurs musculaires et articulaires. Bien diluée, elle peut aussi être appliquée sur les tempes et la nuque en cas de maux de tête. « Bien souvent, cela suffit à les faire disparaître », estime Isabelle Louis XVI. Sinon, on peut se tourner vers les médicaments.
Le sapin baumier
Grâce à ses propriétés décongestionnantes, l’huile essentielle de sapin baumier est très utile en cas d’infection pulmonaire, selon Véronik Tanguay. À diffuser pendant la saison froide, elle peut aussi être diluée et appliquée sur le thorax pour dégager les poumons. « Elle est également intéressante pour activer la circulation, notamment en cas de jambes lourdes », ajoute-t-elle.