Les adultes d’âge mûr sont débordés par leurs différents rôles

Au Canada, les adultes d’âge mûr constituent l’une des ressources les plus importantes, mais aussi les plus sollicitées et les moins reconnues. Ils s’occupent discrètement de la santé et du bien-être de millions de personnes, jeunes et âgées, en présence ou à distance.

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.La Conversation Canada

D’août 2024 à juillet 2025, les adultes canadiens de 55 à 64 ans ont collectivement travaillé plus de 100 millions d’heures par mois dans un large éventail de professions telles que le commerce de détail, le droit, l’ingénierie et les soins de santé.

À cela s’ajoute leurs activités bénévoles officielles : 552 millions d’heures par an, selon Statistique Canada, notamment dans des centres d’aide d’urgence et des écoles. Ils ont aussi consacré 1,342 million d’heures supplémentaires à des activités bénévoles informelles et non rémunérées.

La majorité de ces heures de bénévolat informel est consacrée à soutenir directement des membres de leur famille, comme des parents, des enfants, ou des frères et sœurs. Pendant la pandémie de Covid-19, beaucoup de personnes ont ajouté 20 heures de soins à leur semaine de travail, que ce soit à la maison ou chez un membre de leur famille.

Des aidants surchargés

Nous menons des recherches sur le vieillissement de la population et des individus. Nous avons vu les membres de nos familles se sentir coincés entre les soins à prodiguer à leurs parents et l’éducation de leurs enfants, et négliger ainsi leurs besoins en matière de santé. Ce n’est pas surprenant, car environ une femme d’âge mûr sur cinq s’occupe d’un enfant et plus d’un tiers prend soin d’un adulte.

En observe qu’en moyenne, un aidant fournit 35 heures de soins par semaine, et ce, depuis plus de quatre ans. Trois heures de plus par semaine suffiraient à le mener vers un état proche de la dépression.

Dans le contexte économique actuel, la plupart des gens travaillent pour gagner leur vie, plutôt que pour financer leurs loisirs et leur retraite.

Ainsi, près de la moitié des aidants naturels au Canada doivent travailler à temps plein. Dans ce contexte, six sur dix souhaiteraient avoir une forme de soutien officiel de l’État.

Des études montrent que quatre aidants naturels actifs sur dix ont peur de ne pas pouvoir payer leurs comptes. Pas étonnant que beaucoup d’entre eux commencent leur journée fatigués et stressés.

Les jeunes adultes vivent plus longtemps chez leurs parents

De plus en plus de jeunes adultes de 20 à 35 ans vivent avec un parent. Ils ont davantage de chances d’épargner pour l’avenir en demeurant avec leurs parents.

Des sondages récents révèlent par ailleurs que les adultes d’âge mur ont en moyenne 300 000 dollars de dettes et qu’ils sont préoccupés par les dépenses essentielles du ménage. Un tiers d’entre eux ne sont pas préparés à la flambée du coût de la vie, en particulier pour les dépenses de base et s’ils vivent déjà d’un chèque de paie à l’autre. Certains établissent même un lien entre l’évolution historique de la cohabitation des jeunes adultes avec leur parent et l’augmentation de l’endettement des personnes âgées.

Les adultes canadiens d’âge mûr ont également souffert d’une plus grande détresse mentale pendant la pandémie et se sont sentis davantage jugés et isolés que les Canadiens plus âgés.

Les études indiquent que cette tranche de la population a peu tendance à utiliser les services d’aide communautaires pour des activités telles que la préparation des repas ou la remise en forme. Environ une personne sur quatre ayant eu besoin de services de santé a rencontré des difficultés pour y accéder. D’autres ont déclaré ne pas avoir pris le temps d’en trouver ou préférer se débrouiller seules.

Une charge trop lourde

Selon une étude menée dans 20 pays, la satisfaction à l’égard de la santé à 60 ans est étroitement liée à la perception du vieillissement.

Pour les quinquagénaires et les sexagénaires, le fait de devoir à la fois aider les jeunes générations et s’occuper de leur propre bien-être entame leur confiance en eux. Il est reconnu que consacrer du temps à des activités permettant de mieux se connaître et de prendre conscience de ses qualités constitue un investissement judicieux.

Parallèlement, les priorités fédérales en matière de financement se concentrent sur les programmes de santé mentale destinés aux jeunes et la sensibilisation aux besoins des personnes âgées des adultes susceptibles de devenir proches aidants.

Les adultes d’âge mûr constituent l’une des principales ressources de notre pays, en raison de leur rôle socio-économique et de leur soutien auprès des jeunes et des personnes âgées. Cependant, ils ont eux-mêmes besoin d’attention et de respect pour continuer à assumer ces rôles sans s’épuiser.

Il est temps de demander aux Canadiens d’âge mûr quels sont les fardeaux qu’ils portent, si leur charge est trop lourde, et comment ils la gèrent. C’est une discussion que nous devrions lancer.

Gail Low, professeure agrégée, chaire en santé internationale, MacEwan University, et Gloria Gutman, professeure émérite et associée de recherche en gérontologie, Simon Fraser University.