Charité bien ordonnée commence par soi-même, dit-on. Soit. Ce qui n’empêche pas bien des 50+ de vouloir faire aussi une différence auprès de populations lointaines dont le cadre de vie redéfinit le mot « misère ». Ces humains d’exception ont des expériences incroyables dans leur baluchon. Suivons-en quelques-uns dans le désert marocain, au Pérou, en Haïti et à Madagascar.
Maroc
Géraldine et Pascal Wickert : prêter l’oreille à la misère
Après avoir pris part au rallye Cap Fémina en 2015, au Maroc, l’orthophoniste Géraldine Wickert se prépare à remettre ça, cette fois avec son époux Pascal, lors du rallye Gazelles and Men. Le couple double ce défi à haute teneur en adrénaline d’une action solidaire : la fourniture de prothèses auditives à des enfants sourds du désert.
Un appel à tous publié dans Virage, en 2015, avait permis à Mme Wickert de changer la vie de 50 enfants de la région d’Ouarzazate, grâce à des prothèses auditives usagées données par des membres FADOQ, dans le cadre de Cap Fémina. Un sirocco d’enthousiasme venait d’envahir l’orthophoniste.
De sable et de pauvreté
« Il y a longtemps, j’ai rencontré l’audiologiste et audioprothésiste Fatiha Zitour, qui œuvre à l’école Achourouk pour enfants sourds et enfants trisomiques, dans la région d’Ouarzazate. Je me suis engagée à l’aider un jour. J’ai tenu ma promesse en 2015 mais j’ai alors mesuré la pauvreté extrême des nomades du désert, qui n’ont absolument rien : pas de vêtements chauds pour la nuit, aucun accès à des services de santé et beaucoup de difficulté à trouver à boire et à manger. C’est comme une autre planète », résume Géraldine Wickert.
Complètement chamboulée par ces conditions de vie misérables, elle est revenue au pays avec la ferme intention d’en faire plus. Elle souhaitait aussi revivre l’expérience d’un rallye en 4X4, au cours duquel le sable dans l’engrenage n’a rien d’un mirage.
Son époux Pascal n’a pas fait la sourde oreille à ce projet combinant dépassement de soi et don de soi. Il faut dire que le couple de Gatineau – en amour depuis 40 ans et marié depuis 32 ans – se sert depuis toujours de sa solide fibre humanitaire pour rapiécer le filet social.
En répétition
Les quinquas ont volé vers Chegaga, dans le désert marocain, en décembre dernier, pour suivre une formation de conduite et d’orientation en vue du rallye de novembre prochain. Bien entendu, ils en ont profité pour faire un saut à l’école Achourouk afin de livrer quelque 140 prothèses fonctionnelles et 200 autres utiles pour les pièces. La plupart serviront à des enfants mais un certain nombre permettront d’appareiller des aînés sans ressources de régions éloignées.
De retour au pays, Géraldine et Pascal ont repris la collecte de prothèses auditives. Ils planifient aussi des activités de financement et tentent de parfaire leur préparation afin que l’aventure très intense du rallye, à partager l’habitacle d’un 4X4 pendant au moins 12 heures par jour, ne vire pas en chicane épique !
Leurs rares temps libres sont passés à rêver à l’envoûtant silence des dunes et, bien plus bouleversant encore, au rire magique d’un enfant qui entend pour la première fois…
À propos du rallye Gazelles and Men
Cet événement, qui en sera à sa 2e édition en 2018, est la version mixte du rallye des Gazelles. Il s’agit d’une compétition de 4X4 hors-piste d’une durée de six jours dans le désert marocain, avec orientation à la boussole, à partir de cartes anciennes.
Quant à l’action solidaire du couple Wickert auprès d’enfants sourds ou handicapés, on peut y contribuer par l’envoi de prothèses, de piles ou d’argent. On s’informe à ortho.geraldine@icloud.com ou au maroc2018.com Une autre façon d’aider est d’« aimer » les publications de la page Facebook Pascal et Géraldine au rallye des Gazelles, afin de favoriser les commandites.
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Pérou
André Franche : combattre la pauvreté à sa source
Sept millions de Péruviens n’ont pas accès à de l’eau potable. André Franche, missionnaire laïque au long cours et président directeur des Ailes de l’espérance depuis 17 ans, contribue à apaiser leur soif et à ouvrir les valves de la dignité, un village éloigné à la fois.
Un aventurier de l’humanitaire
« Ça fait 53 ans que j’ai le Pérou dans le sang. J’ai vécu à Lima, puis j’ai rencontré mon épouse Céline Tremblay, originaire de Chicoutimi, en Colombie. En tout nous avons vécu 20 ans en Amérique latine où nos quatre enfants sont nés », résume André Franche, 75 ans, qui espère avoir la santé pendant encore une décennie pour continuer d’assister à l’inauguration de projets au Pérou.
Souvent, des mécènes l’accompagnent. Sylvia Marion, de La Malbaie, l’a fait à l’été 2016. Elle a donné à M. Franche le surnom d’Indiana Jones en raison de l’aventure de plus de 48 h – moto taxi, chaloupe, marche dans la jungle, pirogue et autre marche dans la jungle, de jour comme de nuit – que représente le trajet qu’il a maintes fois parcouru pour atteindre certains villages reculés et carrément abandonnés à leur triste sort.
- Franche cite aussi l’exemple d’un couple de Victoriaville qui, ayant eu vent de la mission des Ailes, a utilisé une somme initialement prévue pour l’achat d’une décapotable afin de financer un projet d’approvisionnement en eau potable. Six membres de la famille ont ensuite fait le voyage pour constater l’impact de ce geste sur des êtres d’une pauvreté extrême. Toute une leçon de vie !
Leur apprendre à pêcher
Le petit bureau de Montréal compte deux employés, dont M. Franche, à la fois petit salarié et grand bénévole des Ailes. Leur défi : amasser des dons de particuliers et de fondations, à hauteur de 500 000 $ à 600 000 $, pour financer annuellement environ huit projets. À Lima, une coordonnatrice gère les projets qui sont supervisés par un ingénieur.
« Pour qu’un projet soit accepté, la communauté doit former un comité d’eau potable composé d’au moins 50 % de femmes, car ce sont elles et leurs filles qui traditionnellement sont responsables de l’approvisionnement en eau et qui marchent quotidiennement plusieurs kilomètres pour aller la puiser. Aussi, la communauté doit s’engager à fournir toute la main-d’œuvre non qualifiée. De cette manière, les villageois voient le point d’alimentation comme une réalisation collective dont ils sont fiers, se l’approprient et l’entretiennent. »
Il raconte que l’arrivée de l’eau dans chaque petit village libère ces Péruviens de la misère dans laquelle ils étaient emprisonnés. « On amène l’eau à chaque maison et ça change complètement la vie de ces familles qui vivaient dans une insalubrité totale. »
Déjà, l’organisme a fait pousser des ailes à plus de 100 petits villages disséminés un peu partout au Pérou.
À propos des Ailes
Les Ailes de l’espérance a été fondé en 1971. À sa mission première, les évacuations médicales par avion au Pérou, s’est ajoutée en 2000 l’aide à l’installation de points d’alimentation en eau potable. Il s’agit, dans les Andes, de systèmes de captation de sources pour un approvisionnement par gravité et, en Amazonie, de puits munis d’une pompe à énergie solaire et de systèmes de purification des eaux polluées par l’activité humaine.
Pour faire un don : ailesdelesperance.org, 1 866 277-5111.
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Madagascar et Haïti
Alain Labonté : l’as du système D
Ce n’était pas du tout le plan de match d’Alain Labonté d’effectuer des missions à l’étranger lorsqu’il a commencé à faire du bénévolat à Collaboration santé internationale (CSI). Pourtant, il en a deux à son actif, à Madagascar et en Haïti, où il a déployé des trésors de débrouillardise pour installer, vérifier et réparer des appareils médicaux.
« En Haïti, je n’avais même pas de pinces et nous étions à des heures de route de la quincaillerie la plus proche », raconte l’ingénieur civil à la retraite, qui a trouvé à CSI un bénévolat à la fois stimulant intellectuellement et différent de sa profession.
Planifier, connais pas !
Au moment de l’entrevue, M. Labonté était tout juste de retour de ce pays écorché vif par la pauvreté et les catastrophes. Pendant trois semaines, il a travaillé aux Cayes et à La Brousse tout en formant dans chaque hôpital un technicien qui prendra le relais pour faire l’entretien des appareils.
« Je vais lui envoyer des pièces et rester en contact avec lui pour le dépanner », dit ce bricoleur qui a lui-même appris sur le tas – et sur Internet – comment réparer ces appareils sophistiqués, au fil de ses six années à CSI.
Son épouse Diane Jutras était aussi du voyage. Physiothérapeute à la retraite, elle a donné une formation d’appoint aux infirmières, laquelle s’est avérée très utile et très appréciée.
Le couple a été très bien accueilli là-bas. Néanmoins, il a eu à composer avec un mode de vie différent à tous points de vue. Exemples ? Des douches à l’eau froide mais surtout, une notion du temps élastique qui rend acceptable de mettre une heure à trouver une clé et qui fait de la planification une véritable hérésie.
Défis malgaches
Le choc a été encore plus grand un an plus tôt, alors qu’il a séjourné à Madagascar, grande île située au large de la côte sud-est de l’Afrique, pour superviser l’installation d’une cargaison de matériel médical. Le citoyen de Beauport avait un chauffeur en tout temps car ce n’était pas prudent de se promener seul, comme Occidental, dans les rues d’Antananarivo, capitale de ce pays champion au triste palmarès des endroits les plus pauvres de la planète.
Il a aussi dû composer avec plusieurs défis techniques, dont l’adaptation à l’ampérage électrique local. Ingénieux, il a même tenté de réanimer un défibrillateur sur une batterie de voiture !
Retournera-t-il en mission ? Il ne ferme pas la porte mais préfère pour l’instant son bénévolat régulier. « Bien qu’enrichissantes, ces expériences ont aussi comporté leur lot de frustrations, plusieurs semaines de préparation très intenses et la rédaction d’un rapport au retour. Mais ça valait le coup. J’ai fait avancer les choses dans les milieux où j’ai œuvré et c’est très valorisant », conclut M. Labonté.
À propos de CSI
Fondé en 1968 et basé à Québec, Collaboration santé internationale est un organisme sans but lucratif comptant sur les dons en argent du public. Sa mission est d’acheminer des médicaments, des appareils médicaux reconditionnés et du matériel scolaire dans des pays en développement. Quelque 50 bénévoles – tous de 50 ans et plus ! – y œuvrent à différentes tâches liées aux missions : remise en état des équipements, manutention des médicaments, etc.
Pour devenir bénévole ou faire un don : csiquebec.org, 418 522-6065.