Et vos semences, elles sont d’ici ?

À l’instar des espèces animales qui s’éteignent à vitesse grand V, 75 % des variétés potagères sont disparues depuis un siècle. Pour éviter que ne soit enterrée à tout jamais cette partie du patrimoine culturel et culinaire québécois, Lyne Bellemare sème à tout vent les graines des légumes d’autrefois.

Qu’on soit ou non adepte de jardinage, la passion qui anime la propriétaire de Terre promise est telle que germe en nous l’intérêt pour son curieux travail. On l’écoute avec délectation décliner les jolis noms de ces trésors de notre patrimoine, en ajoutant une pousse d’histoire sur des familles ou des régions du Québec à qui l’on doit tel haricot nain divin ou telle tomate d’un goût à faire pâlir d’envie ses consœurs des supermarchés.

Tout commence avec la semence

C’est sur un lot loué d’une superficie d’un hectare, faisant partie de la Ferme Bord-du-Lac, à l’Île-Bizard, que sont cultivées pour les graines quelque 150 variétés potagères anciennes ou rares, de même que des fleurs comestibles et des plantes médicinales, tout ça sans pesticides, engrais chimiques ni gaspillage.

L’automne venu, les étapes menant à la mise en sachets des semences sont effectuées à la maison. Pour sa part, la conjointe de Lyne Bellemare, Julie Bérubé, prépare les commandes issues de la vente en ligne (terrepromise.ca). Même les petites mains et pattes de leurs deux fillettes – des jumeaux sont aussi en chemin ! – sont mises à contribution au sein de cette entreprise-mission.

Lyne Bellemare explique que la plupart des semences vendues dans les grandes surfaces, qu’elles soient bio ou non, viennent de l’étranger, souvent de Chine. Il s’agit de variétés hybrides non adaptées spécifiquement au Québec, souvent stériles et choisies selon des critères bien autres que le goût. De plus, certaines semences sont enrobées d’insecticides.

C’est tout le contraire pour les semences paysannes, issues de graines que des familles québécoises ont cultivées depuis des générations et qui correspondent à la culture culinaire d’ici, dans toute sa diversité et sa saveur. Puisqu’elles sont à pollinisation libre, il est facile de replanter les graines année après année, question d’en assurer la pérennité et, du coup, d’économiser.

« En utilisant des semences d’ici et en apprenant à cultiver leurs graines, les jardiniers bouclent la boucle, du compost jusqu’au légume », fait valoir la semencière,  conférencière et coordonnatrice du volet francophone des Semences du patrimoine. On trouve d’ailleurs sur le site de cet organisme pancanadien, semences.ca, les dates des Fêtes des semences qui ont lieu en février et mars dans plusieurs endroits au Québec.

La semencière propose…

En terminant, voici quelques variétés ancestrales suggérées par Lyne Bellemare :

  • Tomates : Mémé de Beauce, Petit moineau ou Savignac;
  • Haricots : Beurre de Rocquencourt;
  • Laitue : Forellenschuss;
  • Carottes : Chantenay Red Core.

 

Photo : Katya Konioukhova