Je joue, donc je suis

Jouer, jouer, jouer. Ce verbe, Normand D’Amour le répète à l’envi, entre deux bouchées d’un très gros petit-déjeuner, carburant du capitaine Achab qui donnera ce jour-là deux représentations de Moby Dick. Avec plus de 90 rôles au théâtre, des personnages marquants au petit et au grand écrans, Normand D’Amour consacre sa vie à jouer… et il adore !

« Capitaine Achab est un de mes plus grands rôles au théâtre, sinon le plus grand. C’est un être enragé, obsédé, imprégné d’une douleur et d’une fureur que j’ai tout de suite comprises parce qu’une telle souffrance m’habitait avant », explique ce comédien d’une rare simplicité.

Il lui a fallu 40 ans en effet pour se libérer d’une colère qui le rongeait depuis toujours, celle ressentie par sa mère lorsqu’elle était enceinte de lui et que son mari a perdu l’usage de ses jambes dans un accident. « Je savais que ça venait de là mais je n’arrivais pas à m’en débarrasser. J’ai eu un déclic en regardant un film : j’ai accepté cette situation que toute ma famille a toujours refusée. J’ai hurlé et pleuré pendant 45 minutes, un véritable rebirth. »

Depuis, c’est un homme plus heureux, plus équilibré, mais qui peut encore toucher au besoin le niveau de colère nécessaire pour incarner certains personnages. « Je peux enfin jouer des bons gars », blague-t-il, en faisant référence à son rôle de William Harrisson dans Yamaska, série dont il achève le tournage de la 7e et dernière saison. Il y a aussi Ruptures, Mensonges, Subito texto, le film Le garagiste dans lequel il joue le rôle principal, etc.

Il sera également de la distribution de L’emmerdeur à l’été 2016, à Drummondville, « un petit rôle comique » aux côtés de Marcel Leboeuf. Lui qui voyage habituellement tous les étés se consacrera donc à ces représentations, tout en renipant son chalet un peu en mal d’affection et, si le temps le permet, en transformant la grange pour la rendre habitable.

Sur son X

« À 53 ans et après 31 années d’une carrière très remplie, je me sens sur mon X, à ma place. Je ne veux pas arrêter. C’est un plaisir pour moi d’être sur scène ou sur un plateau de tournage. Toutefois, si j’avais à ne faire qu’une chose pour le reste de ma carrière, ce serait du cinéma. J’adore le cinéma, car le premier contact avec ce métier-là a été de regarder des films avec mon père. »

Maintenant que ses parents sont décédés, les équipes de travail, au théâtre, à la télé ou au cinéma, deviennent ses familles de cœur. Normand a aussi une conjointe, la comédienne Pascale Montreuil et deux enfants, Lancelot, 24 ans et Marguerite, une adolescente déjà bien engagée dans la même voie que ses parents, qui fait du doublage et joue entre autres dans les Argonautes.

La seule ombre au décor pour cet homme amoureux fou des voyages, du soleil et de la chaleur, est l’ambiance de morosité qui règne au Québec présentement et qui lui donne parfois envie de partir avec son baluchon, pour de bon.

« On est un peuple d’adolescents qui ne veut pas s’en sortir. On serait si bien si on devenait indépendant. Oui, on mangerait nos bas pendant quatre ou cinq ans, le temps de se rebâtir, mais on arrêterait de se faire manger la laine sur le dos », affirme-t-il, avec la conviction et l’intensité qu’on lui connaît.

Deux pubs ludiques valent mieux qu’un

Heureusement, l’espoir que ce projet de société se réalise un jour le retient ici, tout comme sa petite famille et les cercles rapprochés qui se créent autour de ses contrats, plus enthousiasmant les uns que les autres.

Il a d’autres projets aussi, tels que l’ouverture, en janvier, d’un deuxième Randolph Pub ludique à Montréal, près du cinéma Beaubien. Eh oui, en 2012, il a ouvert avec trois associés un premier pub consacré aux jeux de société, une passion plutôt naturelle pour quelqu’un qui vit pour jouer et joue pour vivre.

« Ça fait la file les jeudis, vendredis et samedis, pour s’attabler à ce café et découvrir des jeux de société, rue Saint-Denis. Parfois, j’y vais et je m’arrête pour écouter tout le brouhaha des gens qui jouent. C’est merveilleux. Ça me rappelle ma jeunesse. Chez nous, la maison était toujours pleine et tout le monde jouait aux cartes ou à d’autres jeux de société. »

Avec le temps des fêtes qui approche, il a bien l’intention de mettre à profit le sens de l’hospitalité qui lui vient de sa mère, elle qui lui répétait souvent : « Mon gars, la meilleure façon de donner, c’est de recevoir. ». Lorsque sa maison sera remplie de rires, il fermera les yeux, humera en pensée l’odeur des beignes de sa mère, et sera parfaitement heureux.

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Noël, c’est fait pour jouer

Maniaque de jeux de société, Normand D’Amour en connaît des centaines. Il adore leur côté ludique et rassembleur, qui en font de belles idées-cadeaux pour Noël. Voici les suggestions de cet expert du jeu :

  • L’affaire Audet: Jeu nouvelle formule, fabriqué et imprimé au Québec, mettant en vedette l’inspecteur Laflamme (Normand D’Amour lui-même !). En groupe de 4 à 10 personnes, on incarne des personnages et on participe activement à l’enquête afin de démasquer l’assassin, notamment en visionnant le DVD des interrogatoires et de la scène de crime. 16+, 30 $, gladius.ca
  • L’osti d’jeu: un jeu d’association d’idées 100 % québécois, réservé aux adultes seulement. 3 joueurs et plus, 29,99 $, lostidjeu.com
  • The Resistance – Avalon: un jeu pour les 13+ qui transporte les joueurs dans une ambiance médiévale, où s’opposent le Bien et le Mal (règles en français). 5 à 10 joueurs, 23,99 $, randolph.ca

Photo : Bruno Petrozza – Maquillage : Valérie Quévillon